Friday, April 6, 2012

RDC/KIVU: Bosco démontre sa force à Goma

La démonstration de force du général Bosco Ntaganda a produit l’effet escompté : Goma vit à nouveau dans la peur. Depuis lundi en effet, des jeeps blindées, chargées d’hommes lourdement armés sillonnent la capitale du Nord Kivu et des mouvements de troupes sont enregistrés plus au nord, à Rutshuru et vers Runyoni, du côté de la frontière rwandaise. Les observateurs redoutent une dissidence au sein du 804eme régiment des Forces armées de la RDC, sinon une nouvelle rébellion.
Ces mouvements militaires interviennent alors que la communauté internationale intensifie sa pression sur les autorités congolaises, exigeant l’arrestation et le transfert à La Haye du général Bosco Ntaganda, accusé de nombreux crimes de guerre et de recrutement d’enfants dans l’Ituri. Lors de sa visite à Kinshasa, Didier Reynders avait été le dernier à relayer cette exigence les autorités lui avaient expliqué la situation sur le terrain.
Une situation extrêmement délicate : en janvier 2009, alors que le chef de guerre tutsi Laurent Nkunda, qui avait pris le contrôle d’une large portion du Nord Kivu et menaçait de s’emparer de Goma, avait été arrêté par le Rwanda et mis en résidence surveillée à Kigali, c’est son adjoint, Bosco Ntaganda, qui l’avait remplacé. Pour prix de sa trahison de Nkunda et de son ralliement, Bosco Ntaganda avait négocié et obtenu l’intégration, au sein de l’armée congolaise, des hommes du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple), des combattants aguerris. En effet, nombre d’entre eux ont combattu au sein de l’armée rwandaise et demeurent liés à Kigali tandis que les populations locales leur reprochent de nombreuses exactions ainsi que la prise de contrôle des carrés miniers. Depuis leur insertion dans l’armée congolaise, les militaires tutsis du CNDP, sous le commandement de Bosco Ntaganda, se trouvent en première ligne pour combattre les rebelles hutus, leurs officiers sont déployés de l’Ituri jusqu’au Sud Kivu, garantissant au Rwanda d’une sorte de glacis protecteur. En outre, Bosco et ses hommes sont montés en puissance sur le plan économique : ils contrôlent les circuits de l’or et de nombreux commerçants de Goma leur sont redevables. Répondant à l’exigence de Didier Reynders, le sénateur She Okitundu, ancien conseiller diplomatique de Kabila, nous a assuré que « Bosco Ntaganda sera arrêté, tôt ou tard, car les crimes qu’il a commis sont imprescriptibles et la fuite est impossible. Mais il appartient au chef de l’Etat, dans l’intérêt supérieur du pays, de décider de la manière et du moment. La situation au Kivu est explosive et la priorité, c’est éviter une nouvelle guerre… »
Avec le temps en effet, la situation de Bosco Ntaganda s’est renforcée : il disposerait de plus de 3000 hommes intégrés au sein de l’armée congolaise mais prêts à faire défection et à défendre leur chef. Le CNDP assure qu’il a pour vocation de protéger les Tutsis congolais et ses hommes refusent d’être délocalisés loin du Kivu. En outre, une offensive militaire « Amani Kamilifu » (la paix durable), se déroule actuellement contre les bastions hutus des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) et les hommes du CNDP y prennent une part active. Parmi des commerçants liés à Bosco, une pétition circule, refusant son arrestation. Dans un tel contexte, les autorités congolaises estiment que les exigences de la communauté internationale, aussi justifiées soient elles, sont difficiles à mettre en œuvre et risquent de mettre le feu aux poudres. A sa manière, Bosco Ntaganda a déjà compris le message et répondu par la menace…

Source: Carnet de Colette Braeckman, du 4/4/2012

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