Selon le CNT, le tyran libyen a perdu la vie dans une fusillade. Une version contredite par plusieurs témoignages.
Des images particulièrement crues d'un Muammar Kadhafi couvert de sang et empoigné par des combattants surexcités circulent sur les télévisions du monde entier, semant le doute sur les circonstances exactes de la mort du Guide libyen. Les images filmées de ce qui apparaît comme ses dernières secondes de vie offrent toutefois quelques indications sur sa mort. Muammar Kadhafi était encore vivant lors de sa capture près de Syrte. Dans la vidéo, filmée par un spectateur présent au milieu de la foule, on distingue Muammar Kadhafi tiré hors du capot d'un véhicule et jeté par terre en étant tiré par les cheveux. "Laissez-le en vie ! Laissez-le en vie !" crie une voix. Puis, on entend des coups de feu. Dans le chaos, les images changent alors de plan et ne filment plus l'ancien leader libyen. D'autres coups retentissent alors. "Ils (les soldats) l'ont capturé vivant et, alors qu'il allait être transporté, ils l'ont tabassé et ensuite ils l'ont tué", a confié une source haut placée du Conseil national de transition (CNT) à Reuters. Ces images semblent contredire la version officielle du gouvernement libyen.
Mahmoud Djibril, chef du gouvernement du CNT, a expliqué que Muammar Kadhafi était mort d'une blessure par balle à la tête reçue lors d'une fusillade entre ses gardes et les soldats pro-gouvernementaux. "Le véhicule, quand il s'est mis en route, a été pris dans une fusillade entre les révolutionnaires et les forces de Kadhafi, qui a été touché d'une balle dans la tête", a déclaré Djibril lors d'une conférence de presse à Tripoli, lisant le rapport d'un médecin légiste. "Le médecin légiste ne peut dire si la balle venait des révolutionnaires ou des forces de Kadhafi", a-t-il ajouté.
Conduit d'évacuation
Muammar Kadhafi, qui qualifiait ses adversaires de "rats", a été retrouvé jeudi dans un conduit d'évacuation rempli de détritus près de Syrte, avant de succomber. "Il nous appelait des rats, mais regardez où on l'a capturé !" s'exclame Ahmed al Sahati, soldat de 27 ans, à proximité des conduits d'évacuation qui font flotter une odeur nauséabonde à proximité d'une autoroute. Les récits des soldats du nouveau gouvernement libyen et les images tournées permettent de refaire le film des dernières heures du Guide, qui a dirigé la Libye d'une main de fer pendant 42 ans. Juste après les prières de jeudi matin, Kadhafi, accompagné de quelques dizaines de gardes du corps restés fidèles ainsi que du chef de son armée Abou Bakr Younis Jabr, a tenté de fuir par l'ouest Syrte, assiégé depuis deux mois. Mais il n'a pas pu aller bien loin.
Selon l'Otan, l'armée de l'air a touché des véhicules militaires appartenant aux kadhafistes à proximité de Syrte aux environs de 8 h 30 (6 h 30 GMT). L'Alliance atlantique a indiqué qu'elle ignorait si les frappes avaient tué Muammar Kadhafi. Le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, a déclaré que l'unité aérienne, dans laquelle figurait au moins un avion français, n'avait pas "détruit", mais "stoppé" le convoi, qui aurait été, selon lui, intercepté par les combattants du CNT. Quinze jeeps armées de mitrailleuses ont été détruites et gisaient fumantes à côté d'une usine d'électricité à une vingtaine de mètres de la route principale, à environ trois kilomètres à l'ouest de Syrte. Comme il n'y avait pas de "cratères" au sol causés par une bombe, on peut penser que la frappe a été l'oeuvre d'hélicoptères ou de chasseurs. À l'intérieur des jeeps, on pouvait voir les corps des passagers et des conducteurs morts lors des attaques. D'autres corps reposaient mutilés sur le sol, une cinquantaine au total.
"Mon chef est ici !"
Kadhafi et quelques-uns de ses proches ont cependant réussi à sortir vivants de l'attaque. L'ex-dirigeant libyen semble avoir couru à travers une rangée d'arbres vers la route principale pour se cacher dans deux conduits d'évacuation. Mais il avait à ses trousses les soldats du gouvernement libyen. "Au début, nous leur avons tiré dessus avec des armes de DCA, mais ça n'allait pas", a dit un de ces combattants, Salem Bakir. "Après, nous avons marché dans cette direction à pied." "Un des hommes de Kadhafi a brandi son fusil en l'air en disant qu'il se rendait, mais, dès qu'il a vu mon visage, il a tiré sur moi", a-t-il dit à Reuters. "Après, je pense que Kadhafi a dû lui dire d'arrêter. Mon chef est ici, mon chef est ici ! a dit l'homme, Muammar Kadhafi est ici et il est blessé", a poursuivi Salem Bakir. "Nous sommes alors entrés et nous avons sorti Kadhafi (du conduit d'évacuation). Il disait Qu'y a-t-il ? Qu'y a-t-il ? Que se passe-t-il ?, alors nous l'avons saisi et mis dans une voiture", explique-t-il.
Au moment de sa capture, l'ancien chef d'État était déjà blessé par balle à la jambe et au dos, d'après Bakir. D'autres soldats pro-gouvernementaux, présents lors de la capture de Kadhafi, ont confirmé la version des faits de Bakir lors de récits séparés. Un homme a toutefois donné une autre version de la capture. "Un des gardes du corps de Muammar Kadhafi a tiré sur lui à la poitrine", a dit Omran Djouma Shaouan. Des câbles électriques recouvraient l'entrée du conduit d'évacuation, où l'on pouvait voir trois corps à une entrée et quatre autres de l'autre côté. Tous étaient noirs, et l'un se trouvait décapité. Des soldats du gouvernement exultaient, tirant des coups de feu en l'air, criant "Allah Akbar" et posant pour des photos. Certains "taguaient" le mur, avec l'inscription "Kadhafi a été capturé ici".
Source: Le Point, Publié le 21/10/2011 à 07:00 - Modifié le 21/10/2011 à 07:24
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