BAMAKO -- L'annonce de la prise de Kidal par les rebelles a plongé le Mali dans la stupeur.
Aujourd'hui, ils sont nombreux à reconnaître que le coup d' Etat du 22 mars n'était pas opportun et qu'il n'a fait qu' accélérer la conquête du nord par les hommes du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA, rébellion touareg).
"Voila le résultat de l'inconscience; de l'indiscipline, de la précipitation et du geste impulsif et irréfléchi des soldats mutins. C'est toutes les communautés civiles noires et blanches ( sonrhaï, tamacheques et arabe) qui vont bientôt affronter cette horde de hors la loi qui croient que l'Azawad est leur terre à eux seuls", s'indigne un responsable de communication dans une ambassade du Mali à l'étranger.
"L'heure est vraiment grave. Chaque minute qui passe nous rapproche inexorablement vers le chaos. Au moment ou Kidal vient de tomber, le capitaine Sanogo en appelle à l'aide internationale pour appuyer l'armée. Quel paradoxe! En attendant cette hypothétique et improbable aide, le reste du Nord est menacé, dangereusement menace même avec tous les risques d'exaction. Et pourtant, nous avons des armes et des hélicoptères de combats ainsi que leurs munitions déjà payés et qui n'attendent qu'à être livrés. Mais, à cause de la non reconnaissance du CNRDRE (junte), ils sont bloqués en Europe", ajoute une source diplomatique malienne.
"Pendant que le Colonel Gamou (le commandant en chef des troupes à Kidal) résistait de façon héroïque à Kidal, des dizaines et des dizaines de militaires ont fui Gao pour rentrer à Bamako. Il n'y a plus de chaîne de commandement et plus d'approvisionnement correct des combattants sur le terrain. Des militaires qui sont désormais utilisés comme des faire valoir.
Lors de la manifestation pro-putschiste de mercredi, quelque 800 militaires ont été invités à s'habiller en civil et d'amener une ou deux personnes avec eux pour aller gonfler les rangs des manifestants ! Quelle tragi-comédie", s'insurge Birama Kéita, un jeun professeur d'anglais.
Pour, de nombreux cadres rencontrés dans différents services de l'administration aujourd'hui, les sanctions économiques qui vont entrer en action lundi prochain, le pire est à craindre.
"Les fonctionnaires à qui on ne payera pas leurs salaires pourront manifester dans les rues. Mais, avec des militaires sans solde et sans vivres, bonjour le désordre. EDM (Energie du Mali) est déjà à bout de souffle et dans les jours à venir, faute de combustibles, les groupes vont s'arrêter et le pays sera plongé dans le noir. Une obscurité que les bandits de grand chemin adorent pour sévir", craint un officier de la gendarmerie nationale.
"Le récipient a déjà versé de l'eau. Cherchons maintenant à limiter les dégâts. Je n'ai jamais soutenus ce coup d'état, mais ceux qui croient encore au Mali peuvent donner leur avis sur la gestion du pays, surtout au nord. Voilà que Kidal vient de tomber. Sans jeter la pierre sur le régime du Président ATT, les auteurs du coup doivent pouvoir nous dire quelque chose : sinon pourquoi ils sont là ?", s'insurge une femme d'affaires.
Présentement, ils sont nombreux les Maliens qui souhaitent l' intervention des forces extérieures, notamment les troupes de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), pour aider leur pays à "repousser les assauts de cette horde d'aventuriers sans scrupules et qui agissent sur la base d'un idéal ethnocentriste qui n'est basé sur aucun fondement géographique, historique ou culturel etc. La vie d'hommes, de femmes et d'innocents enfants est en danger sous cette épée de Damoclès".
"Avec la chute de Kidal je crois que les opportunistes qui sont à Bamako doivent comprendre que Sanogo et ses bidasses feraient mieux de quitter le pouvoir et aller se battre sur le front. Vraiment je suis déçu de certains pseudos intellectuels maliens qui s'attaquent à la CEDEAO", pense A. Koïta, un jeune leader politique.
"Nous avons tous notre rôle à jouer et ne pas agir, c'est accepter de voir notre cher Mali sombrer dans une déchéance réversible si nous restons unis", ajoute-t-il.
Le capitaine Sanogo va-t-il se rendre à Ouaga pour répondre à l'invitation de Compaoré? Aura-t-il le sens patriotique de se retirer afin que le Mali vive ? Ses soutiens civils auront-ils la sagesse de lui conseiller de mettre le Mali au-dessus de n'importe quel autre ego ? Ce sont autant de questions que se posent ce soir ceux qui se préoccupent réellement de l'avenir du Mali.
Pour ce diplomate occidental, "je ne sais pas ou ils (les putschistes) vont avec leur marge de manoeuvre réduite à néant par les sanctions de la CEDEAO. Avec la prise de Kidal ce matin, Tombouctou et Gao sur le fil du rasoir (...), ce n'est vraiment pas le moment de réfléchir aux destins personnels des uns et des autres. Il faut agir maintenant sinon le Mali va perdre sa souveraineté compromises par les succès militaires des rebelles".
Source: Xinhuanet, du 31/03/2012
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