Monday, January 23, 2012

RDC: Processus électoral en difficulté: 6 mois de gâchis

Rien de nouveau sous les tropiques. Bien au contraire, le ciel est nuageux et l’avenir incertain. L’on est de plain pied dans cette zone de turbulence électorale qu’il est encore difficile de prévoir une voie de sortie. En attendant, le temps s’écoule. Pas d’éclairci pour être sûr que les institutions de la République seront installées avant le 30 juin et qu’elles fonctionneront normalement.

Depuis le 6 décembre 2011, le mandat de la première législature a pris fin. Le 20 décembre
2011, le président Joseph Kabila a prêté serment. Le 13 janvier 2012, la Commission électorale nationale indépendante, CENI, devrait rendre publics les résultats des législatives. Si les choses se déroulaient sans trop de casses ou de contestations, l’Assemblée nationale devrait être mise en place avant la fin du mois de janvier, et au plus tard à la mi-février, l’on disposerait d’un nouveau gouvernement.

Entre-temps, la CENI s’attaquerait à l’organisation des élections provinciales, communales, urbaines et locales dans la mesure où le 12 mars 2012, le mandat des sénateurs et des institutions provinciales, également, prendrait fin. Si tout se passait bien, toutes les institutions de la République fonctionneraient normalement dès fin avril 2012.

Mais à l’allure où vont les choses, tout ceci ne serait qu’illusion. Le calendrier électoral de la CENI est fortement perturbé à telle enseigne que la RDC risque de ne pas avoir toutes ses institutions en place avant le 1er juin 2012. Avec cela, il est important de prendre en compte cette crise politique qui s’affirme chaque jour. Si elle n’est pas résolue dans les meilleurs délais, elle apporterait son grain de sable au fonctionnement de l’Etat.

Or, à dater du 6 décembre 2011, fin de la dernière législature, au 1er juin 2012, on aura totalisé 6 mois de perdu, de gâchis. Sans budget de l’Etat. Un temps précieux pour cette législature qui ne disposera pratiquement plus que de quatre ans, au lieu de cinq.

Le processus électoral menacé

Il est une chose qu’il faut à tout prix retenir, c’est que le processus électoral en lui-même est fortement menacé. L’étape des législatives pose encore un vrai et réel problème que si l’on franchit la passe sans trop de difficultés, il subsistera un brin d’espoir.

En fait, les contestations en cascade sont en train de discréditer le processus lui-même. Il y a risque, après le 26 janvier 2012, que la Cour suprême de justice soit submergée par la pile de contestations. S’il faut accorder un traitement responsable et impartial à tous ces contentieux électoraux comme le souhaite vivement Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, OIF, la CSJ aura l’obligation morale, politique et judiciaire de bien mettre à profit les deux mois de traitement de dossiers. Ainsi, les mois de février et mars seront consacrés à l’examen des contentieux électoraux. A moins de les expédier à la quatrième vitesse et se frotter les mains, comme pour dire «mission accomplie, mon général…»

C’est dire que ce n’est qu’à partir du 1er avril que l’on pourrait assister à la rentrée politique à travers la mise en place de l’Assemblée nationale. Débuteront alors la mise sur pied des structures de cette institution, à savoir le bureau et ses différentes commissions, tout en dégageant entre-temps la «Majorité parlementaire». Ce qui permettra au président de la République de désigner le formateur qui se chargera de constituer la future équipe gouvernementale.

Cependant, cette étape est tributaire de résultats des législatives. Autant ils reflèteront la vérité des urnes, autant la tâche sera allégée. Dans le cas contraire, les tractations politiques seront marquées par des tiraillements, à la lumière des contestations.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le même rythme marquera les élections provinciales, communes, et locales. Muntis mutandis, en ce qui concerne les institutions provinciales, à savoir les assemblées provinciales et les gouvernements provinciaux. Hormis les gouverneurs de province, lesquels, en conformité avec la dernière révision constitutionnelle, seront nommés et révoqués par le président de la République. Une révision constitutionnelle susceptible de poser un réel problème de cohabitation politique au niveau des provinces, au regard toujours de toutes ces contestations qui sont en train d’émailler les législatives 2011.

Mais le vrai problème réside dans la crédibilité de la CENI et la fiabilité du scrutin. A la lumière des évidences de derniers jours, l’image de la CENI est fortement entamée. La preuve la plus irréfutable est cette menace du président de la CENI devant les pressions de toutes parts de la classe politique, surtout celles de la Mouvance présidentielle, a-t-il laissé entendre. Un aveu tacite que le processus électoral a été effectivement entaché de graves irrégularités et qu’il existe des «jusqu’au-boutistes» qui, manifestement, méprisent le peuple souverain. Seuls, le pouvoir, la gloire et les intérêts partisans comptent pour eux.

En fait, la menace ou le chantage, c’est selon, du président de la CENI ne surprend personne. La CENI portait déjà en elle-même les germes de sa propre destruction. Cette classe politique qui exerce des pressions sur la CENI ne demande rien d’autre que de se «faire payer» en lui «fabriquant sa majorité parlementaire». N’importe comment. Voilà la vérité. Le reste n’est que distraction. Cependant, le pire, disons, le crime : c’est l’avenir de tout un pays et le devenir de tout un peuple qui sont piégés.

Se faire hara kiri

Ainsi dit, tous les signaux sont là et qui prédisent le pire. Ce n’est pas du «Congo-pessimisme». Mais de ces signaux qui parlent d’eux-mêmes.

En fait, il est de plus en plus évident que pendant six mois, la RDC risque de ne pas voir les nouvelles institutions mises en place et son processus électoral complètement perturbé. Partant, les élections provinciales, municipales, urbaines et locales qui n’ont jamais eu lieu, ne seront qu’un rêve de mauvais goût. Et si elles auront lieu, elles seront sans enthousiasme, avec une forte abstention tant la population est en train de perdre goût à ce processus électoral, disons politique, la CENI ayant failli à sa mission.

Que faire ? Il n’y a pas de solution miracle. Puisqu’il n’est jamais trop tard pour mieux faire, toutes les parties concernées doivent se faire hara kiri. Reconnaître les erreurs et les corriger. Principalement la CENI et la Cour suprême de justice en mettant les bouchées doubles en vue de faire refléter la vérité des urnes, de sanctionner, sans état d’âme, ceux qui ont enfreint la loi électorale et pénale.

Ceci permettra aux personnes frustrées de se faire violence d’une part, et de l’autre, on pourrait certainement désarticuler ou désamorcer cette crise politique qui s’enracine chaque jour davantage.

C’est à prendre ou à laisser. Dans le premier cas, ce serait sauver le processus électoral, au-delà faire «vivre la RDC». Dans le second, c’est condamner la RDC à disparaître. Ce serait de la haute trahison.



Source:Le Potentiel, du 24/01/2012

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