Monday, February 14, 2011

RDC: La révision constitutionnelle votée le 15 janvier 2011: «Une manipulation malhonnête, contre productive et dangereuse de la Loi fondamentale»

I. INTRODUCTION

Le 15 janvier 2011, le Parlement Congolais, réuni en Congres, a voté une loi portant révision de la Constitution de 2006 par 485 votes positifs contre 8 négatifs, 11 abstentions et en l’absence de l’opposition. Elle a été promulguée le 20 du même mois par le président Joseph Kabila (JKK).

Lors des assises du PPRD à l’université du cinquantenaire à Kisangani, l’annonce qui y avait été faite était une sorte de ballon d’essai et la plupart des Congolais n’avait pas bien saisi la subtilité du discours du ‘constitutionnaliste’ E. Boshab, Secrétaire Général du parti présidentiel et président de l’Assemblée nationale de la RD Congo , lorsqu’il affirmait à peu près ceci: «…Nous allons tout mettre en marche pour faire élire le Président Kabila au premier tour en 2011…». Par ailleurs, pour l’avoir entendu, au cours d’une récente conférence organisée par l’université de Liège, dans le cadre des manifestations relatives au cinquantenaire de la RD Congo , affirmer haut et fort que la Constitution de 2006 était juste une «Charte de paix entre belligérants», j’avais vite compris qu’il se mijotait quelque chose de mauvais pour l’avenir du pays.

Sans être dans les secrets du ‘diable’, je crois fermement que le camp présidentiel est déterminé à demeurer au pouvoir jusqu’en 2025, sans justifications plausibles ni propositions viables et alternatives de gouvernance. J’en parle à l’affirmative parce que j’avais déjà entendu cette idée dans le cercle stratégique restreint de Joseph Kabila, au moment où je prestais dans son Cabinet en qualité de Conseiller, entre 2002 et 2005. Ma préoccupation par rapport à cette vision avait toujours été celle de savoir: rester au pouvoir si longtemps pour quelle raison et pour quoi faire? Je vous avoue que je n’ai jamais reçu, à ce jour, de réponse satisfaisante à cette double interrogation. Ce que j’ai appris par la suite, dans ce même milieu, est encore plus effrayant et dangereux pour le pays. Si, en plus, les rumeurs qui courent sur le nom du possible futur président de la Cour constitutionnelle, membre éminent du Comité de stratégie dont il est question ci-dessus, se confirmaient, rassurez vous, nous ne serons pas à l’abri d’un ‘hold up’ électoral à la Bagbo , ni des scènes du genre de celles des ‘mangeurs de Procès Verbaux’ de la Commission électorale d’Abidjan, surtout que cette éminence grise est un féroce partisan de l’établissement d’une nouvelle ‘Monarchie Kabiliste’ ou tout bonnement d’une ‘présidence à vie’ de triste mémoire au profit du ‘Rais’.

D’aucuns me rétorqueraient qu’il est légitime que les ‘Kabilistes’ en prenant le pouvoir veuillent y rester le plus longtemps possible. Je suis du même avis, mais c’est la manière qui n’y est pas. C’est la façon de procéder qui heurte la conscience. Si un Grand homme d’Etat français a dit que la politique était une chose si noble pour que l’on puisse la laisser dans les mains des «Roturiers», c’est moi qui ajoute, j’ose croire que dans le camp présidentiel, la «Noblesse» peut obliger quelques uns.

En tout état de cause, la RD Congo n’est pas encore une ‘Monarchie’ et encore moins un pouvoir traditionnel à la ‘Mwat Yanv’ par exemple. Elle est une République c’est- à -dire : un système politique dans lequel l'État doit servir le "bien commun" et non des intérêts privés comme dans la monarchie (exception les monarchies "démocratiques" telles que la Belgique, les Pays-Bas, etc). La souveraineté appartient au peuple qui exerce le pouvoir politique directement ou par l'intermédiaire des représentants élus. Ceux-ci reçoivent des mandats pour une période déterminée et sont responsables devant la nation. Par ses représentants, le peuple est la source de la loi. L’autorité de l'Etat s’exerce par la loi sur des individus libres et égaux.

II. DEVELOPPEMENT

Pour revenir au sujet de ma prestation de ce jour, huit articles ont été en effet révisés, sauf le 220 sur l’intangibilité, à savoir[6] : *Art.71, al.1: présidentielle à 1 tour au lieu de 2 tours-*Art.110: suppléance : droit de retour de l’élu effectif-*Art.126: crédits provisoires au lieu de 40%-*Art.149: Parquet sous autorité ministre Justice-*Art.197-198: arbitrage Président de République sur provinces-*Art.218: Convocation du référendum: Président de la République.-*Art.226: 26 provinces: loi programmation.

De façon ramassée, notez que les arguments avancés par le Camp présidentiel pour justifier cette révision soulèvent des questions de fond qu’il aurait fallu débattre dans l’apaisement. Certains «Experts» de ce camp réacquièrent l’anonymat pour le dire. Ces justifications sont, entre autres[7] : - délai 15 jours raisonnable contre 45 jours devant la Cour suprême de justice, ex 2006 (30 juillet à 29 octobre ce qui donne 91 jours); - La Bipolarisation : une source d’affrontements armés possibles; - Simplification, rapidité, réduction coûts des opérations électorales (en tenant compte des autres élections a organiser et de la lourdeur du comptage de votes!); - Légitimité du suppléant comparée à la légitimité du partant; - La logique d’élu par rapport à la logique de parti? ((justification : la perte du mandat parlementaire par suite de la nomination du député ou du sénateur à une fonction politique pose un problème de fond dans un régime de démocratie électorale où les équations personnelles comptent de façon significative au-delà de l’impact des organisations politiques dont les candidats portent les couleurs); - Réalisme en ce qui concerne les crédits provisoires ; - Solution réaliste adoptée par divers pays en ce qui concerne le parquet, alors que les ONG de droits de l’homme dénoncent un risque d’abus de pouvoir dénoncé; - Au sujet des arbitrages en provinces c’est-a-dire : la dissolution assemblée par exemple, la fin des fonctions de gouverneur, en cas blocage. Pour illustration, on parle de 2006-2010 où le Président est intervenu 4 fois pour 11 provinces, tandis que les opposants craignent la dérive vers l’autoritarisme et la suppression de l’autonomie des provinces ( viole de l’article 220 de la Constitution); - Erection de 26 provinces: absence de la Loi de programmation et impossibilité du respect de la constitution; -Modification de la Loi électorale : préférence du vote majoritaire dont les avantages et difficultés sont : éviter la dispersion des sièges; - difficultés de construire des coalitions ; nouvelles propositions de calcul, si redécoupage des circonscriptions, le besoin d’enrôler les électeurs correspondant, etc. En 2006, en vertu du principe du plus fort reste, 4 004 listes au scrutin provincial dont 514 (soit 12,8 %) ont récolté des sièges dont 71 listes (1,8 %); 13,8% des listes ayant obtenu un élu ont atteint ou dépassé le quotient électoral; 3 933 listes (98,2 %) n’ont pas atteint le quotient.

Comme on peut le constater, honnêtement, tous les arguments avancés par les Kabilistes ne sont pas faux, mais ce sont les enjeux qui sont derrière cette révision qui hérissent la peau car ils n’ont rien à voir avec le bien du pays, sauf celui de l’oligarchie en place. Je voudrais dire, à ce stade, que le camp présidentiel pourrait se tromper en manipulant la Constitution.

L’hypothèse la plus favorable pour leur candidat, en ce qui concerne le vote présidentiel à un tour, serait que Kabila gagne plus de voix avec l’augmentation des électeurs (20%) et atteigne en même temps un chiffre plus élevé qu’en 2006 à l’Est; ce qui n’est plus sûr ! si on tient en plus compte du nouvel enrôlement au Kasaï qui atteindrait 140%. Il y a la nouvelle donne Tshisekedi (TSK) et Kamerhe qu’il faudra intégrer dans tous ces calculs. Si, en absolu, les hypothèses des ‘Experts’ du camp présidentiel devraient se vérifier, le 1er tour suffirait, si les résultats de 2011 restent les mêmes pour les cinq premiers candidats de 2006 (% premiers: Kabila, Bemba, Gizenga, Kashale et Zanga Mobutu); mais les résultats seront-ils les mêmes en 2011? Qui remplacera Bemba et quel sera son score? Quelle est la méthode de vérification de ces hypothèses par la majorité ? Ce sont là les questions que les spécialistes du camp présidentiel se sont posées avant la révision. Tout laissait prévoir une baisse du vote pour JKK que «l’effet TSK» risquerait de transformer en déroute au second tour ; JKK pouvant compter sur la «prime au sortant» et sur le «vote de précaution» pour arriver malgré tout premier au premier tour. La modification de la Constitution permettrait à ce résultat de devenir le résultat final et définitif [8]. C’est dire que, malgré les cinq chantiers, rien n’était encore joué!!

2.1. Manipulation Malhonnête

Les collègues juristes ou constitutionnalistes [9] d’E. Boshab ont suffisamment épilogué sur le sujet pour que j’y revienne en détails ; ils ont dit entre autres: «…on a égratigné l’indépendance judiciaire, article 149 ; on a remis en cause l’autonomie des provinces, articles197 et 198 en violation de l’article 220. Bref, tout ceci dénote le fait que la révision ne répond à aucune vision globale de l’organisation de l’Etat, la proposition reprend des objets divers et disparates qui ne répondent pas à quelque souci de l’unité d’une révision constitutionnelle, estime l’un des meilleurs juristes du pays».

Le Sénateur de la CDC, Mokonda Bonza, dit ceci à ce même propos, je cite: «… Dans cette proposition de révision, il y a divers objectifs et donc plusieurs intérêts : a. pour certains, retrouver leur siège au parlement après avoir été à la soupe ; b. pour d’autres, tordre le cou aux gouverneurs empêcheurs de tourner en rond et/ou déstabiliser les institutions provinciales délibérantes qui donneraient du fil à retordre aux gouverneurs pourvoyeurs de fonds ; b. pour l’exécutif, masquer son incapacité à mettre en œuvre la politique du régionalisme politique et de la décentralisation telle que voulue par le Constituant mais aussi contrôler le pouvoir judiciaire et l’instrumentaliser comme c’est le cas aujourd’hui ; c. pour d’autres encore, tricher aux prochaines élections afin de faire passer leur candidat au premier tour; d’enfin, pour d’autres encore, parvenir à modifier plus tard la Constitution en escamotant le referendum.»

Ma modeste contribution, à ce stade du débat, relève du bon sens, d’une analyse essentiellement politologique, et surtout, de la pratique élégante en politique pour ne pas dire de l’excellence en politique. Ma préoccupation est de constater que le Camp Kabila pense que le succès procède seulement de la ‘triche’, alors qu’à mes yeux, les clefs de la réussite sont : le bilan du mandat accompli, un discours convaincant et démonstratif, un renforcement des capacités électorales et des méthodes de contrôle des enjeux électoraux de 2011 et une stratégie électorale efficiente in fine. Je conviens encore que cela se passe par les «Ordi» et des «alliances trompe-l’œil» comme en 2006 que par un ‘coup d’Etat constitutionnel’ dont les conséquences imprévisibles ne sont ni à l’aune du leadership en place ni à son emprise éventuelle sur une nouvelle crise qui surgirait. A moins que PPRD et alliés aient décidé de gouverner par crise interposée! C’est aussi une façon de se maintenir longtemps au pouvoir mais dans tout ca, qui sait comment s’en sortirait-on en cas de crise?

Les exemples édifiants de la Côte d’Ivoire, de la Guinée Conakry, du Niger et de la Tunisie feraient de toute évidence des émules en RD Congo, j’en suis convaincu. Lorsque quelqu’un est acculé dans ces derniers retranchements, il adopte souvent des attitudes suicidaires. Je crois que c’est le cas de l’opposition institutionnelle qui, pour n’avoir pas vu venir le boulet, pourrait faire les frais de son ‘indolence’ politique et de son manque d’anticipation lors des prochains scrutins. Va-t-elle accepter de payer seule?

Le camp présidentiel doit savoir qu’en politique, il faut toujours laisser une marge de manœuvre pour l’adversaire et que les échecs, en politique, sont une école d’expériences pour le futur. On n’a pas besoin d’un forcing pour des questions d’intérêt national et d’un futur commun. Lorsque l’on institue une nouvelle dictature après 32 ans de celle de Mobutu, c’est qu’on a rien compris de la roue de l’histoire qui continue à tourner ; on est soit ‘myope’ politique, soit naïf, soit, en définitive, malhonnête! Malhonnête dans les faits parce que les raisons avancées pour justifier la révision sont fallacieuses et unilatérales. La méthode a énervé l’esprit de la Loi fondamentale, nonobstant les élucubrations des ‘pseudos’ constitutionnalistes intéressés et qui foulent la science aux pieds par leur indécence.

2.2. Manipulation contre productive

Le tollé que la révision du 15 janvier a soulevé dans l’opinion nationale et timidement à l’extérieur du pays, prouve qu’elle a été mal envisagée et qu’on n’en tirerait pas nécessairement profit par qui que se soit. Au contraire, elle va nous mener tout droit à une nouvelle instabilité alors que le moment était propice pour la consolidation de la jeune démocratie congolaise, conquise au prix du plus grand sacrifice jamais recensé dans le monde, soit près de cinq million de morts, une stérilisation barbare des femmes, un pillage éhonté des ressources naturelles, une spoliation sans pareille du patrimoine national, une hypothèque irréversible de l’avenir de nos enfants pour au moins deux générations…

Avec cette cabale, les «faux vrais Bons élèves» du point d’achèvement PPTE risquent de se voir recalés à nouveau, si ce n’est pas déjà le cas avec les dernières reculades du Club de Pari; d’autant plus, semble-t-il, que ce point d’achèvement n’aura été qu’un «arrangement politique», obtenu par le maquillage des résultats et des concessions compromettantes. Les chiffres qui circulent en sous mains montrent qu’en plus de la corruption, on pratique du «faux en écriture» au sommet de l’Etat, en RD Congo.

A quoi, a-t-il servi au camp présidentiel de s’attirer le courroux de tout un peuple et de mettre la puce à l’oreille de la communauté internationale [10], au moment où il a besoin de rassembler et de rassurer? L'Union européenne a, quant à elle, suivi attentivement le processus de révision de la constitution congolaise qui a conduit notamment au changement des règles de l'élection présidentielle ainsi que celles relatives aux équilibres institutionnels et le contexte dans lequel il a eu lieu. Elle note que ce processus méritait un débat public plus large. C’est timide comme réaction, me dira-t-on, mais c’est assez éloquent, je pense. En diplomatie, tous les termes ont un sens implicite exploitable au besoin et en temps opportun. Peut-on raisonnablement considérer comme légale une révision ayant violé la loi fondamentale? De qui se moque-t-on?

Comment va-t-on, de toutes les façons, expliquer que les cinq chantiers auront été une réussite au moment où l’on recourt à la manipulation constitutionnelle pour gagner? On peut tromper un peuple une fois, mais jamais tous les temps ! Mentez, mentez, il restera toujours quelque chose! Voici ce que Mokonda en pense : - contrat chinois: négocié et conclu en dehors de toute procédure normale de négociation des accords de financement; -concentration des projets dans certaines provinces en l’absence de toute planification; -délaissement voire abandon des autres provinces, à l’instar de l’Equateur, de la Province Orientale, d’une grande partie de Bandundu et de deux Kasaï; - l’emploi, est-ce réellement un chantier ? Si oui, comment expliquer qu’à l’occasion du Cinquantenaire, le gouvernement ait commandé des pagnes en Chine donnant travail et revenu à ce pays, en lieu et place de la SOTEXKI ? - Où en sommes-nous avec le programme Energie : eau et électricité? -Stagnation ou relance timide de l’agriculture et de l’industrie manufacturière; - Croissance dangereuse des importations au détriment de la production nationale et des ménages agricoles; - Institutionnalisation de la politique des dons avec les ressources du Trésor public. Qui dit mieux?

Je suis persuadé que le discours des animateurs de «Lingala facile» suggérant plus de temps est encore plus audible qu’une «vile» manipulation de la Loi fondamentale. Le PPRD et Alliés risquent de payer cash et cher sa méprise à l’égard du peuple congolais et de l’opinion internationale.

Maintenant qu’on a mis la puce à l’oreille de l’adversaire, ne pense-t-on pas qu’il s’échafaude de nouvelles stratégies et que l’on risque de radicaliser certains fiefs électoraux et en arriver à la préférence du genre de celle de Bemba en 2006 en adoptant, par exemple, un slogan simple tel que: «Tout sauf Kabila!»

Il est évident que les compétitions de 2011 auront, entre autres enjeux, l’élection transparente d’un président jouissant d’une forte légitimité en vue de booster une adhésion suffisante du peuple à ses projets et de requérir l’acceptation des mesures contraignantes que dictent la dernière crise économique et financière mondiale. Les perturber, en amont, relève tout simplement de la criminalité.

Que pèserait la RD Congo avec un président ‘mal élu’ face aux convoitises des voisins et à la compétition pour le leadership dans les Grands Lacs, en Afrique centrale et en Afrique australe? Rassurez-vous, je ne suis pas ignorant en disant cela!

A mon avis, la démarche pprdienne procure des excuses à l’indolence de l’opposition institutionnelle et dévoile les faiblesses de celle extra parlementaire, de même qu’elle fige les carences du pourvoir en place pour ‘fraude consommée’ à l’avance des élections de 2011.
Les dérives ‘inadmissibles’ relevées en des points ci-dessus prouvent à suffisance que la démarche du PPRD en révisant la Loi fondamentale est, en plus d’être une stupidité et une grossière bourde, la fuite en avant d’un pouvoir agonisant et incertain qui, de ce fait, devient dangereux pour la RD Congo.

Au regard du bilan ci-dessous, le ‘Stratagème pprdien’ en cours s’inscrit dans une démarche réfléchie et consciente de la part de ses initiateurs. C’est la seule issue de secours pour eux ! Et, pourtant, l’autre voie aurait été d’accepter l’alternance au pouvoir, après 10 ans d’exercice, afin de se refaire la santé, politiquement s’entend.

Tenez, depuis 2007[11]: des constantes violations de la Constitution et des lois de la République par le Président de la République et les membres de son gouvernement ont été effectuées. Voici quelques-unes des dispositions violées [12]: (art. 213); (art. 211) ; (Constitution et art. 4 Loi n° 08/012 du 31/07/2008); (Loi n°08/016 du 07/10/2008); (art. 13); (art. 2 et 226); (art. 7); (art. 10) ; la révision cavalière de la Constitution et de la Loi électorale dans le but d’asseoir juridiquement la tricherie.

La répétition est la mère des sciences, dit-on ! Le bilan gouvernemental que produit l’adversaire acculé et qui est repris en écho aujourd’hui par les «faux-vrais dissidents» n’est pas de nature à encourager les hésitants des élections de 2006, et encore moins, à encourager les Kabilistes à bomber le torse lors de la prochaine campagne électorale. Il se résume en 13 points, chiffre porte malheur, ci-après[13]:

1. son absence systématique à toutes les rencontres internationales importantes où il devait s’exprimer au nom de la RDC;

2. la corruption systématique des députés des partis membres de la majorité;

3. l’institutionnalisation de l’impunité face à l’ampleur des détournements des deniers publics, de versements des pots de vin, bref, de l’enrichissement rapide et sans cause;

4. la collaboration avec des réseaux maffieux qui exploitent illégalement les ressources naturelles congolaises ou qui blanchissent l’argent sale faisant ainsi de notre pays un havre de paix pour les malfaiteurs, les terroristes, les contrefacteurs et autres bandits;

5. la conclusion des accords bilatéraux commerciaux qui ne profitent pas à la République Démocratique du Congo;

6. la gestion complaisante des litiges frontaliers avec les pays voisins;

7. les assassinats et autres tueries du Bas-Congo à l’extrême-est du pays, en passant par Kinshasa et l’Equateur où personne n’est épargnée;

8. les viols massifs sans distinction de sexe et de l’âge, en particulier dans les provinces du Nord-Est et de l’Est;

9. aucune mesure de protection des Congolais sur le territoire national ou d’accueil des compatriotes expulsés des autres pays;

10. des menaces et intimidations quotidiennes sur les membres de l’opposition et de la Société civile qui pensent différemment;

11. la cession de tout l’espace congolais à des entreprises minières étrangères aux adresses souvent inconnues et le survol par des aéronefs contre toutes normes de sécurité, ce qui pose un problème de l’effectivité de l’exercice de la souveraineté par l’Etat congolais à tous points de vue;

12. l’extension des manifestations de la pauvreté et de la misère sur tout l’espace congolais;

13. que sait-on des cinq chantiers?

2.3. Manipulation dangereuse

L’expérience congolaise confirme que les régimes politiques africains sont tributaires des conditions de leur avènement et qu’ils les reflètent. En RDC, le passage d’un régime à l’autre s’effectue presque systématiquement par une rupture plus ou moins brutale. «Le mode de transition politique influe sur la manière dont le processus démocratique évolue par la suite [14]», estime David Beetham, spécialiste britannique des droits de l’homme. «Les acteurs apprennent des processus politiques et tendent ultérieurement à dupliquer les expériences ainsi apprises», analysent James G. March et Johan P. Olsen. Avant d’ajouter: «Les institutions et les pratiques ont une existence autonome et tendent à œuvrer à leur propre reproduction [15].» Ainsi, la conférence nationale souveraine a été suivie de trois changements par rupture autoritaire ou violente : le limogeage du premier ministre élu en août 1992, la guérilla de 1997 soutenue par l’intervention militaire des puissances étrangères et la captation personnelle du pouvoir par Laurent-Désiré Kabila.

L’attitude de la classe politique congolaise est révélatrice. Pour elle, l’élection n’est qu’une des modalités de règlement des conflits. Elle admet a posteriori avoir sa part de responsabilité dans la rupture du processus démocratique. Elle reconnaît également son erreur : ne pas avoir présent à l’esprit que la «révolution» ne saurait être une méthode normale de résolution des crises politiques. Mais, en pratique, les mêmes comportements se retrouvent de crise en crise.
Après son coup fourre du 15 janvier dernier la majorité présidentielle doit se ressaisir et tenir compte du cours de l’histoire en ne se mentant pas sur la réussite possible de son stratagème. Les données chiffrées, le contexte et les stratégies adverses feront que ce stratagème soit mis en échec. La tolérance est permise lorsqu’il s’agit d’une première fois, elle est difficilement reconductible une seconde fois. C’est dire que les tripatouillages de 2006 ne seront plus de mise en 2011.

Pour ne pas me limiter aux critiques et incantations «maléfiques» proférées de partout à l’endroit de cette majorité par une large opinion congolaise, je suggère qu’un débat de clarification et d’apaisement (séminaire scientifique avec le concours des universités et animé par des Experts neutres et moralement irréprochables) entre toutes les parties, soit organisé autour des enjeux et défis électoraux de 2011 afin d’aboutir à une convention nationale (engagement formel, réel et sincère) de reconnaissance par tous des résultats issus des urnes. Rassurez-vous, une deuxième fois, je ne suis pas naïf; mais je voudrais croire que le Camp présidentiel regorge encore quelques ‘Colombes’ à même d’intégrer la dangerosité de ce qui vient de se faire. Si ce n’est pas le cas, je crois que je suis en droit de dire qu’ils sont tous devenus ‘fous’ et ‘c…’! Je voudrais terminer en disant ceci : lorsqu’un intellectuel ne sais pas faire un saut qualitatif dans le sens de l’objectivité et de la neutralité, il est simplement un technicien du savoir qui met sont intelligence au service du mal et il est pour cela condamnable. Pour finir : ‘on ne peut pas être chef de l’Etat d’un peuple qui a 100% en étant le chef (de l’Etat) de 20%. On est mal à l’aise soi-même, dixit, Cardinal Monsengo Pasinya.

Notes
[1] Tiré de l’ouvrage de Robert Lenoir intitulé : Démocratie et son histoire, Paris, P.U.F., 2006, p.178

[2] Tshibuabua-Kapia Kalubi, les avatars d’une démocratie libérale représentative mal engagée ou La Dérive d’une majorité partisane en R.D.Congo Esquisse d’une analyse diachronique de la situation politique congolaise, Conférence-débat tenue dans le cadre de l’Asbl Le Clan, 2008, Liège.

[4] Patrick QUANTIN, Les élections en Afrique : entre rejet et institutionnalisation ; Centre d’Etude d’ Afrique Noire / I.E.P. de Bordeaux.

[5] Tiré de l’article de Mukoka Senda: Les déterminants de l’acte de vote lors des élections générales de 2006 et 2007 en RDC : éléments de sociologie du comportement électoral, in le Potentiel, 2007.

[6] Pierre Verjans, prestation le 18 janvier 2011devant la Commission du Senat Belge, Capac, université de Liège.

[7] Idem
[8]Guy De Boeck, Devinette congolaise: Que va-t-il se passer avec la présidentielle à un tour? Congo Forum, 21.01.11

[9] Il s’agit principalement des interventions d’Auguste Mampuya Kanuk’A Tshiabo, président du parti Rader/RD Congo qui dit en substance: on a égratigné l’indépendance judiciaire, article 149; on a remis en cause l’autonomie des provinces, articles197 et 198 en violation de l’article 220 qui stipule: Est formellement interdite toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités décentralisées; pour modifier l’article 197, on estime que, comme le président de la République «assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics», il doit pouvoir «dissoudre une assemblée provinciale» «par une ordonnance délibérée en Conseil des ministres et après avis des bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat» «lorsque des circonstances politiques graves menacent d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales». De même, dans les mêmes «circonstances politiques graves», le président de la République peut relever de ses fonctions le gouverneur d’une province, modifiant ainsi l’article 198 ; alors que l’article 220 ne dit nulle part qu’une exception peut être faite pour impliquer une extension des attributions d’arbitre du président de la République. Cela serait vrai même s’il s’agissait d’établir un parallèle avec la situation de l’Assemblée nationale alors même que dans ce dernier cas, le président (le la République n’a pas le droit de révoquer les membres du gouvernement) …

[10] Au sujet de la timidité de la Communauté internationale, De Boeck dit ceci : Il ne faut pas fonder d’espoir sur une quelconque réaction d’indignation de la «communauté internationale». Comme l’ont constaté les journaux de Kinshasa «Les partenaires (sont) d’accord pour un scrutin à un tour»: la réaction internationale a été de constater que rien d’illégal n’avait eu lieu en RDC. Quelques diplomates occidentaux ont rencontré le Premier ministre pour exprimer leur adhésion au principe d’une présidentielle à un tour. A la seule condition que le scrutin soit transparent, serein, ouvert à tous les courants politiques…Que veut dire, en fait, l’attitude presque unanime de «reconnaissance de la légalité de la Révision» accompagné de cette «insistance pour que le scrutin soit transparent, serein, ouvert à tous les courants politiques? A peu près ceci: «Cher JKK, nous avons vu votre petit coup de Jarnac. Ce sont vos affaires intérieures, donc, pas de commentaire. Maintenant que vous vous êtes assuré un avantage par une tricherie légale, allez-y doucement et ne vous lancez pas dans des tricheries illégale». Ajoutons-y le non-dit, c'est-à-dire l’arrière pensée: «Nous, puissances impérialistes, avons de toute façon intérêt à ce que les Etats africains soient faibles et instables. Vos petites ambitions vous font jouer notre jeu, bande de naïfs!»

[11] [11] Florentin Mokonda Bonza lors de la matinée politique tenue à Kinshasa le8 janvier 2011

[12] Le Président de la République a conclu des accords bilatéraux qui ont permis aux troupes étrangères, rwandaise et ougandaise notamment, de franchir nos frontières et d’occuper des pans entiers de notre territoire sans discussion préalable en conseil des ministres et sans informer le Parlement (art. 213); -il a utilisé des artifices juridiques pour assurer le fonctionnement de la CEI pour ainsi préparer les élections présidentielles et législatives de 2011 à son avantage (art. 211) ;-il a nommé des Commissaires de district alors que le District en tant que structure administrative n’existe ni dans la Constitution ni dans les lois votées au parlement depuis 2008 (Constitution et art. 4 Loi n° 08/012 du 31/07/2008);-le gouvernement a nommé et continue de nommer maires, bourgmestres et autres chefs de secteur en violation de la Constitution et des lois de la République (Loi n°08/016 du 07/10/2008);

-le gouvernement a mis en place un système de rémunération du personnel de l’Etat selon que l’on est domicilié à la capitale ou non, système qui préjudicie les agents et fonctionnaires de l’arrière-pays (art. 13);

-le régionalisme politique et la décentralisation n’ont pas été mis en œuvre tel que prévu par la Constitution et les lois de la République (art. 2 et 226);

-la volonté affichée du Président de la République et de sa majorité à instaurer un parti unique sur l’ensemble du territoire à travers la politisation et l’instrumentalisation des agents et fonctionnaires de l’Etat ainsi que ceux des entreprises publiques (art. 7);

-l’arrangement politique dit «moratoire» de mars 2007 ayant mis au frigidaire le principe constitutionnel de «la nationalité une et exclusive» (art. 10);

2. Le renvoi aux calendes grecques des élections urbaines, municipales et locales;

3. Le blocage de la mise en place de la CENI; 4.La révision cavalière de la Constitution et de la Loi électorale dans le but d’asseoir juridiquement la tricherie.

[13] Mokonda: Op.Cit
[14] David Beetham, spécialiste britannique des droits de l’homme
[15] James G. March et Johan P. Olsen

Author: Pr.Benoit-Janvier TSHIBUABUA-KAPY’A Kalubi
Gouverneur honoraire de province
La révision constitutionnelle au forceps du PPRD est dangereuse d’autant plus qu’elle nous ramène à la situation ‘ante Lusaka’, dans ce sens qu’elle crée les mêmes circonstances ayant poussé certains à recourir aux armes. Lorsque vous lirez le renvoi au point douze vous comprendrez pourquoi je stigmatise cette situation.

Par ailleurs, du fait que tous les objectifs de l’Accord de Pretoria n’ont pas été atteints, cette révision produit de nouveaux enjeux, défis et objectifs alors que nous trainons un contentieux non vidé. Cela crée une surcharge politique et repousse à un avenir encore plus lointain la normalisation de la situation socio-économique du pays. Cela a aussi pour conséquence que nous puissions continuer à subir le diktat de la Communauté internationale qui avait décidé de nous accompagner et qui ne peut nous rendre autonomes parce que les points convenus au calendrier ne sont pas épuisés. Concrètement, nous avons consommé dix ans pour un dixième du calendrier. En faisant bien le compte, l’on constate combien de temps encore le Congo sera sous la tutelle internationale? Cela est comparable à la durée de la colonisation et c’est inadmissible pour tout homme sensé et qui tient à sa dignité.

Pensez-vous que le Congolais est encore prés à subir la domination étrangère pour cent ans où va-t-il se rebeller un jour comme le peuple Tunisien? Et, en cas de rébellion du Congolais, quelles seront les conséquences sur les neufs pays voisins, l’Afrique et le monde, au moment ou l’on combat le terrorisme? A-t-on une idée de la proportion de la réaction d’un peuple tant humilié? En surchargeant le paysage politique congolais et en viciant l’ambiance nationale, le PPRD met le pays sur une orbite dangereuse ; il doit être stoppé dans cet élan ‘stupide et suicidaire’.

III. CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Source:  Etiame.com, du 14/02/2011

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