Le Premier ministre de Alassane Dramane Ouattara, Guillaume Soro, a annoncé son intention de procéder bientôt à l’installation effective de son équipe à commencer, ce jeudi 16 décembre, par celle du Directeur général qu’il a nommé pour la Radio télévision ivoirienne. Coup de bluff ou véritable décision ? Difficile de le dire. Toujours est-il que la mise en oeuvre de cette décision risque d’être compliquée dans le contexte actuel.
Certes, fort de sa légitimité et du soutien international dont il jouit, le camp Ouattara entend exercer son autorité à la tête de l’Etat. Mais, il est illusoire de croire, au stade actuel des choses, que cela se passera sans difficulté. Il n’est un secret pour personne que la rencontre des équipes des deux camps sur le terrain, pour occuper les mêmes postes, ne se fera pas sans heurt. Bien au contraire. Les invectives et autres actes de défiance posés jusque-là trouveront un terrain pour se matérialiser. L’affrontement qui est, jusqu’à ce jour, resté verbal depuis la publication des résultats trouvera là, une occasion de prendre corps.
De quels moyens disposent Soro pour concrétiser sa décision ? Que feront les hommes en armes et les civils des deux camps ? C’est un face-à-face plein d’incertitudes et inquiétant qui s’annonce d’autant que le camp Ouattara a appelé ses partisans à sortir pour l’accompagner dans cette expédition. Il est clair que dans une bataille comme celle qui oppose les deux parties en Côte d’Ivoire, la personne qui occupe un poste de façon effective en est le véritable maître. Chacun en a conscience. Le camp Gbagbo notamment sait que sa présence effective à ces différents postes de l’Administration est ce qui fait qu’il en a encore plus ou moins le contrôle. Pour lui, cette décision de Soro constitue ni plus ni moins qu’un acte de défiance, de provocation. Dans ces conditions, on ne se fait pas d’illusion sur sa détermination à défendre avec ardeur ces bastions de son pouvoir. En tout cas, si Gbagbo est toujours dans sa logique de rester au pouvoir -rien à ce stade ne laisse penser le contraire- on imagine mal ses partisans assister les bras croisés à la concrétisation de ce projet d’installation de l’équipe de son adversaire. Le blocus imposé à l’hôtel du Golf par les forces de défense et de sécurité fidèles à Laurent Gbagbo le 13 décembre dernier sonne d’ailleurs comme un avertissement. Il en découle que l’affrontement est inévitable si l’autre partie tient mordicus à réaliser son projet. Ce ne sera donc pas une promenade de santé, une partie de plaisir pour ceux qui iront à l’assaut de ces institutions. La loyauté des forces de défense et de sécurité ivoiriennes sera également mise à l’épreuve. Inutile de dire que chaque camp marquera ou perdra des points selon qu’il sortira gagnant ou perdant de cette épreuve de force. Pour l’équipe Gbagbo, une perte de la direction de ces postes-clé de l’Etat signifie plus ou moins sa chute.
Ce regain de tension, faut-il le rappeler, survient au moment où l’Union européenne a pris des sanctions ciblées contre le camp Gbagbo et face auxquelles plus d’une personne s’attend à la radicalisation du régime, entre autres. Pour l’équipe Ouattara, c’est également un pari non moins risqué. Cette décision s’inscrit probablement dans sa volonté de matérialiser son autorité, mais aussi, de pourrir davantage la situation pour le camp d’en-face en le poussant peut-être à la faute. Seulement, si cette annonce n’est pas suivie d’effet, elle peut être contreproductive. Ce serait une sorte d’échec politique. Ce qui est sûr, ce jeudi sera un jour de tous les dangers en Côte d’Ivoire. Il marquera une étape décisive dans l’évolution de la crise qui secoue le pays. Une fois de plus, les Ivoiriens retiennent leur souffle.
Author: Relwendé Auguste SAWADOGO
Source: Le Pays, du 15/12/2010
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