Cela revient à dire à juste titre que la liberté d’expression, c’est vraie est un couteau à double tranchant, est la sève nourricière de tout système démocratique. On ne peut que se réjouir quand la divergence idéologique conduit à la transcendance et l’éclosion de la vérité, tout en ouvrant des brèches pour une meilleure compréhension des faits politiques et sociétaux.
Cela étant dit, je reviens à l’objet même de ce papier, qui est une répartie de l’article intitulé «Vital Kamerhe : A parcours exceptionnel, destin exceptionnel ?», écrit par Monsieur Mayoyo Bitumba Tipo-Tipo, que je remercie pour ces innombrables articles sur la société et l’état politique congolais, quoique de fois je ne partage pas toujours certaines opinions par lui défendues.
En cette période trouble de notre histoire, où des questions existentielles de la nation congolaise se posent, où des Congolais, du moins quelques uns, aspirent à l’excellence ; l’article ci-haut cité, dont le titre si pompeux et flatteur m’a laissé sans mot, venant d’une personne qui se dit rigoureux dans le traitement des faits. De sa lecture, j’en suis ressorti plus qu’affamé, tant le produit proposé à la consommation, loin d’être succulent, est surévalué.
Cet article est purement et simplement un panégyrique troublant les sens, pour hypnotiser et séduire les non avertis, ceux dont la mémoire ne permet pas de forger des opinions par eux-mêmes.
Je ne dis pas que Kamerhe n’a pas de qualités, il en a sûrement, mais de là à affirmer gratuitement et sans vergogne que Kamerhe est le seul plus grand format politique congolais capable de donner une dimension nationale à son parti sans les moyens de l’Etat, et cela non pas à la suite d’un essaimage de son groupe ethnique à travers le territoire national… tout simplement en utilisant son parcours personnel qui est exceptionnel; est un de ces discours aigre-amer que l’on voudrait ingurgiter malicieusement aux Congolais alors que rien dans son parcours tant personnel que politique n’est exceptionnel, sinon une conjugaison d’opportunisme et d’insouciance manifeste des désidérata populaires.
En tant qu’observateur de la chose politique congolaise, je ne vois rien qui puisse être souligné comme fait d’armes, du point de vue des valeurs démocratiques et d’intérêt national, dans le parcours de Kamerhe, si ce n’est la satisfaction d’intérêts personnels. Ca serait malhonnête de le présenter comme celui qui incarnerait le mieux l’avenir et les intérêts du Congo, alors qu’il ne s’est pas encore repenti de son ouvrage Pourquoi j’ai choisi Kabila ? dans lequel il a étalé ses convictions politiques. Une personne aussi sensée que lui, pouvait-elle vraiment soutenir Joseph Kabila, dont l’incompétence sautait aux yeux ? Pendant que les libertés individuelles et collectives de Congolais étaient confisquées par son mentor, qu’avait-il fait pour dénoncer les arrestations arbitraires dont souffraient tous ceux qui s’opposaient au système Kabila, qu’il a aidé à mettre en place, et dont il a été un des défenseurs patentés ?
Monsieur Mayoyo renchérit : Sur le chemin de la paix, le chef de l’Etat congolais se permet de s’allier aux envahisseurs en invitant officiellement leur armée à traquer leurs ennemis sur le territoire congolais. Kamerhe participait au festin du pouvoir. Il aurait pu se taire, car la politique africaine voudrait qu’une bouche pleine ne parle pas. Mais il a exprimé son opposition à l’acte posé par le chef de l’Etat, ce qui a poussé ce dernier à lui retirer le beefsteak de la bouche.
Je voudrai souligner ici que Kamerhe n’était pas le seul à dénoncer cette traîtrise de Joseph Kabila et sa famille politique. Je l’ai félicité en son temps pour le courage dont il avait fait preuve. Cependant, là où le bât blesse, Vital Kamerhe en tant que président de l’Assemblée nationale, institution constitutionnellement habilitée à contrôler l’exécutif, le discours ne suffisant pas, quelle procédure avait-il mis en branle pour saborder l’œuvre machiavélique entamée par Joseph Kabila ? Quand il s’est rendu compte que son président et son parti galvaudaient l’intérêt national, ce qui est une grande érosion idéologique à même d’entraîner le divorce, pourquoi n’avait-il pas de son propre chef, démissionné du perchoir de l’hémicycle et de son parti, au lieu d’attendre que ses camarades pprdéens lui réservassent un camouflet indigne de lui, en le poussant dehors tel un malpropre ? En plus, il a démissionné de la présidence de l’Assemblée nationale tout en restant cadre dirigeant de PPRD, ou est la rupture idéologique ?
Ce qui prouve en plus que les déclarations faites en son temps par celui que l’on veut nous présenter comme le meilleur de tous les potentiels présidentiables, n’étaient pas le fruit des convictions foncièrement ancrées en lui, auxquelles il croit vraiment, c’est son allocution d’éviction de la présidence de l’Assemblée nationale, du 25 mars 2009, dans laquelle d’après moi, il avait malignement renié ces déclarations à la base de sa disgrâce, quand il dit : …Si j’ai eu à blesser telle ou telle autre personne par mes gestes, par maladresse, par omission ou inadvertance, qui sont toutes des faiblesses inhérentes à la nature humaine, à ceux qui se retrouveraient dans ce cas, je leur demande de bien vouloir accepter mes excuses que je demande solennellement. Si par un seul instant, que certaines de mes positions avaient pu blesser mes frères et sœurs, autres que parlementaires, je leur demande pardon. Je ne voudrais pas quitter ce lieu en laissant derrière moi des frustrations. Au chef de l’Etat, son excellence Monsieur Joseph Kabila Kabange, je demande aussi pardon, si jamais il s’est senti offusqué par mon comportement, je lui renouvelle ici et de manière solennelle mon profond respect.
Cette partie du discours de Kamerhe témoigne à n’en point douter, qu’il n’a jamais assumé ces déclarations, car à ce que je sache, les intérêts nationaux et la souveraineté du pays ne sont jamais négociables, ni faire objet de compromis. S’il avait vraiment déclaré ce qu’il pensait, il n’avait pas à présenter des excuses aux personnes qui ont piétiné les intérêts de la nation, la dignité et l’orgueil congolais. Il s’agissait d’un discours de rachat, malheureusement comme tout système inique dévore ses propres fils, la machine de sa mise à l’écart était déjà engagée, hélas !
Enfin, je ne suis pas aussi naïf que semble l’être l’auteur de l’article sus-évoqué, pour me laisser berné par la personnalité de Kamerhe qui, depuis qu’il est dans le camp de gouvernants, ne s’est jamais distingué par un acte de bravoure qui tienne en compte la condition miséreuse de la population congolaise, alors que comme président de l’Assemblée nationale avec ses collègues députés, ils se sont arrogé des émoluments gigantesques sans se soucier des fonctionnaires et agents publics. Il est resté muet devant les massacres perpétrés dans le Bas-Congo par le système qui l’a nourri, et la confiscation des médias publics au seul bénéfice de sa famille politique.
Ce qui m’intrigue en outre, c’est la coïncidence de sa sortie politique avec le retour d’Etienne Tshisekedi, que le pouvoir avait mis hors-jeu trop tôt. Une sagesse nous dit qu’il faut toujours se méfier des coïncidences. Devant la crainte d’un cuisant échec de Joseph Kabila dès le premier tour, toutes les tactiques sont alors possibles, si elles pourraient subtiliser de précieuses voix à l’opposition afin de permettre à son mentor d’arriver au second tour. Réfléchissons-y.
N’allons pas trop tôt et à la va vite dans des conclusions hâtives, que nous allons regretter plus tard. Dans l’histoire politique de notre pays, nous avons vu plus opposants que Kamerhe, qui ont fini par se complaire dans les mêmes tares qu’ils critiquaient, le cas de Mende, Olengankoy, Kamitatu, Nguz, Mungul Diaka etc.
Author: Freddy Matundu Lengo
Source: Congoindépendant 2003-2010, du 21 Décembre 2010
Source: Congoindépendant 2003-2010, du 21 Décembre 2010
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