Les réformes économiques peuvent faire peur aux décideurs politiques, mais démocratie et libéralisation économique vont souvent de pair. La démocratie est bénéfique pour les réformes structurelles, mais l’inverse n’est pas vrai : la libéralisation économique pratiquée par les autocrates ne provoque pas de transition vers la démocratie. De plus, rien ne confirme les craintes des politiciens qui pensent que les électeurs punissent toujours ceux qui réforment le secteur financier ou qui réduisent les déficits budgétaires.
La crise financière mondiale a montré que les pays doivent entreprendre des réformes structurelles pour rehausser leur revenu et stabiliser leur économie. En supprimant les obstacles à la croissance, les réformes comme la libéralisation des échanges, les privatisations et la réglementation des monopoles peuvent accroître la production potentielle et donc, à terme, profiter à tous. Cependant, les réformes structurelles touchent souvent des intérêts puissants et peuvent être difficiles à mettre en œuvre.
Pour le Fonds monétaire international (FMI), ceux qui sont convaincus que les régimes moins démocratiques sont bénéfiques pour la libéralisation économique peuvent citer les importantes réformes entreprises au Chili par la junte militaire sous Augusto Pinochet dans les années 70 et 80 et en Corée du Sud pendant le règne autocratique de Park Chung-hee dans les années 70 et 80. Bon nombre de pays actuellement industrialisés n’étaient pas des démocraties lors de leur décollage économique. En Asie de l’Est par exemple, le développement a souvent eu lieu sous des régimes non démocratiques.
En effet, un régime entièrement démocratique peut être la proie de certains groupes d’intérêt qui font passer leurs objectifs avant le bien-être de la société. Des capitalistes campant fermement sur leurs positions de recherche de rente sont parfois les premiers à s’opposer aux réformes. Dans un pays nouvellement indépendant, il peut falloir un « dictateur bienveillant » pour protéger les institutions, empêcher le gouvernement de tomber sous la coupe de groupes d’intérêt et faire fonctionner l’Etat efficacement. Des groupes d’intérêt peuvent, en particulier, bloquer les réformes si la répartition des bénéfices à en attendre est incertaine. La démocratie peut aussi aller de pair avec une consommation privée et publique excessive et un manque d’investissements, tandis que les régimes dictatoriaux peuvent faire augmenter le taux d’épargne intérieure par la répression financière. Les salaires sont généralement plus élevés dans une démocratie. Plusieurs pays, dont ceux de l’ex-URSS et une grande partie de ceux d’Asie de l’Est, ont accru leur épargne et sont finalement parvenus à un rythme de croissance économique élevé grâce à un système politique répressif, doublé d’un système financier très réglementé. Des arguments théoriques puissants et des éléments empiriques solides confortent l’idée que la démocratie accompagne souvent les réformes économiques.
Quelques arguments théoriques
Le premier élément que le FMI donne, ce sont les préférences des dictateurs qui peuvent varier avec le temps. Puisque aucune loi ne les empêche de changer d’avis, la volonté de réforme des dictateurs ne peut pas être crédible. Les autocrates ont tendance à se comporter de façon prédatrice, ce qui perturbe l’activité économique et réduit à néant les efforts de réforme, c’est le deuxième élément. Comme troisième élément, les régimes autocratiques ont tout intérêt à différer les réformes et à réserver à leurs partisans l’accès aux activités génératrices de rentes. A l’opposé, les dirigeants démocratiques sont généralement plus sensibles aux intérêts de la population et plus enclins à entreprendre des réformes qui démantèlent les monopoles dans l’intérêt de tous. Comme quatrième élément, la protection des droits de propriété que garantit une démocratie est essentielle pour le développement économique.
Disons qu’il existe aussi de nombreux éléments empiriques qui prouvent que la démocratie et les réformes vont de pair. Mais les pays plus démocratiques sont aussi les plus réformés, mais une corrélation ne signifie pas nécessairement que la démocratie est la cause des réformes économiques. Cette relation pourrait très bien être inversée, ou il se pourrait encore qu’un troisième facteur commun soit le moteur des deux autres. La question de l’effet de la démocratie sur la réforme économique reste en grande partie sans réponse.
A ce niveau, il faut souligner que l’amélioration des Institutions démocratiques est significativement corrélée avec l’adoption de réformes économiques. La transition d’un régime autocratique à une démocratie totale s’accompagne d’une hausse de 25% de l’indice de réforme. Ainsi, la démocratie est bénéfique pour les réformes structurelles, mais que l’inverse n’est pas vrai : la libéralisation économique pratiquée par les autocraties ne provoque pas de transition vers la démocratie. De plus, rien ne confirme les craintes des politiciens qui pensent que les électeurs punissent toujours ceux qui réforment le secteur financier ou qui réduisent les déficits budgétaires.
Des pays africains font exception
Au-delà de tout ce que vient de dire le Fonds monétaire international (FMI), il faut vite retenir que certains pays africains avec leurs dictateurs font exception. C’est le cas de la dictature en Rd Congo ex. Zaïre, qui a beaucoup plus profité au régime de Mobutu qu’à la population. A l’exemple d’autres dictatures qui ont développé leurs pays, le pays de Mobutu ne s’est pas du tout développé, pendant que le pays disposait de tous les atouts pour ce faire. Nous citerons par exemple les réformes enclenchées dans le cadre du Programme d’Ajustement Structurel (PAS) du FMI, qui a beaucoup plus apporté la misère que les réformes attendues par la population. Comme conséquence, tous les secteurs n’ont pas évolué, et les entreprises publiques sont restées des canards boiteux et des vaches à lait pour les différents mandataires, au grand dam de la population congolais. Et il a fallu un peu d’efforts et de sérieux de l’actuel Gouvernement pour que les réformes soient appliquées et profiter cette fois-ci à la population congolaise.
En ce qui concerne la Rd Congo, il est vrai que la démocratie a favorisé les réformes qui ont permis d’atteinte du Point d’achèvement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), signalons que les réformes ont été réalisées avec l’aide de la communauté internationale. Tel est le cas de la dernière matrice qui a été décidée entre le Gouvernement congolais et la Banque mondiale, représentant d’autres bailleurs de fonds de ce pays. Mais la volonté reste celle du Gouvernement congolais qui est déterminée à améliorer son climat des affaires, ainsi que la transparence dans la gestion des revenus issus des industries extractives.
Author: Jean-Marie Nkambua
Source: L'Avenir Quotidien, du 18/05/2011
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