L'armée de la République
démocratique du Congo et les mutins ex-rebelles se sont affrontés à l'arme
lourde samedi pour le contrôle de Jomba (est), près du parc des Virunga au Nord-Kivu
où les dissidents sont confinés mais résistent depuis dix jours aux attaques
répétées des loyalistes.
Les affrontements ont débuté vers 04H00 (02H00 GMT)
quand les mutins ont attaqué les positions des Forces armées (FARDC) dans cette
zone du territoire de Rutshuru, dans la province du Nord-Kivu, située à une
dizaine de kilomètres à l'ouest de la frontière avec l'Ouganda, selon une
source militaire. Les loyalistes ont reculé d'environ deux kilomètres,
permettant aux mutins d'occuper la paroisse de Jomba. Les combats se sont
intensifiés en fin de matinée, et l'armée a dû user d'armes lourdes pour
finalement arriver à récupérer ses positions. Les combats ont cessé en fin de
journée. Un journaliste de l'AFP a pu voir six soldats FARDC blessés qui ont
été acheminés à l'hôpital de Rutshuru. "C'est l'armée gouvernementale qui a
commencé à nous attaquer. Nous avons avancé un peu et récupéré des armes
lourdes", a affirmé à l'AFP le porte-parole des mutins, le
lieutenant-colonel Vianney Kazarana. "L'objectif n'est pas de prendre
Jomba", avait-il assuré dans la matinée.
Les combats dans la zone ont fait fuir les
habitants de la proche localité de Bunagana, frontalière avec l'Ouganda.
"Toute la semaine il y avait des gens qui partaient, mais depuis le front
ouvert samedi, la population a fui en Ouganda. C'est le désert ici maintenant.
Il n'y a peut-être plus que des chiens et des militaires", a déclaré à
l'AFP le chef de poste de Bunagana, Léon Bipegeka. Le regain de violences ces
derniers jours dans la région a provoqué le déplacement de milliers de civils:
plus de 8.200 se sont réfugiés au Rwanda depuis le 27 avril, et plus de 30.000
en Ouganda en mai, selon des chiffres communiqués mercredi par le Haut
commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).
Alliance avec les
FDLR ?
Estimés à plus de 300 selon Kinshasa, les mutins
sont des
anciens combattants de la rébellion tutsi-congolaise du Congrès
national pour la défense du peuple (CNDP), intégrée dans les FARDC après un
accord de paix le 23 mars 2009. Ils ont commencé à faire défection de leurs
unités au Sud et au Nord-Kivu début avril. Traqués par l'armée depuis fin
avril, ils sont regroupés depuis une dizaine de jours à l'extrême nord-est
d'une petite bande du parc national des Virunga, bordée par le Rwanda et l'Ouganda,
à une soixantaine de km au nord-est de Goma, la capitale du Nord-Kivu. Ils sont
établis sur quelques collines, dont celle de Runyonyi où se trouve leur QG, qui
ont été récemment bombardées par des hélicoptères de l'armée.
Vendredi, le gouvernement les a appelés à rentrer
dans le rang. Seuls les "initiateurs de la mutinerie et les criminels
parmi eux" seront traduits devant la justice militaire, a déclaré le
porte-parole du gouvernement Lambert Mende. Kinshasa accuse le général Bosco
Ntaganda, ex-chef d'état-major du CNDP qui a fait aussi défection, d'être le
meneur de la mutinerie.
Selon M. Mende, le général s'est allié avec des
milices
locales et un colonel de la rébellion hutu-rwandaise des
Forces
démocratiques de libération du Rwanda (FDLR),
actives au Nord et au Sud-Kivu.
Les FDLR ont démenti toute alliance avec le général. Le lieutenant-colonel
Kazarana se réclame, lui, du Mouvement du 23 mars (M23), créé début mai par le
colonel Sultani Makenga -ex N.3 du CNDP- juste après avoir déserté. Le M23 affirme
n'avoir aucun lien avec les FDLR ou Ntaganda.
Ce dernier est visé depuis
2006 par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour
enrôlement d'enfants soldats. Depuis sa fuite le général mutin aurait recruté plus
de 150 mineurs et jeunes hommes, selon l'ONG Human
Rights Watch (HRW). La localité de Jomba, où se
déroulaient les affrontements samedi, est le fief de l'ancien
chef du CNDP, le Tutsi congolais Laurent Nkunda, détenu
depuis janvier 2009 au Rwanda voisin.
Source: Jeune Afrique, du 20/05/2012 à 10h:33
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