Wednesday, March 30, 2011

Côte d'Ivoire: Ouattara prend le pas sur Gbagbo

Deux jours après le début de leur offensive, les forces d'Allassane Ouattara ont progressé vers le sud et vers Abidjan. C'est la première fois que le camp du président ivoirien reconnu par la communauté internationale à l'issue des présidentielles du 28 novembre dernier, choisit clairement la force pour tenter de clore une crise post-électorale qui a fait plus de 460 morts selon l'ONU, et menace de faire basculer le premier exportateur mondial de cacao dans la guerre civile.

•Les forces de Ouattara progressent

Les partisans d'Allassane Ouattara affirment qu'ils contrôlent désormais les trois-quart du pays. C'est ce qu'a affirmé ce mercredi matin Ally Coulibaly, son ambassadeur en France du président, sur RTL. "Les forces républicaines (...) mettront tout en œuvre pour qu'il n'y ait pas de guerre civile. Il n'y aura pas de guerre civile, les choses vont se régler assez rapidement. Face à l'obstination de Laurent Gbagbo (président ivoirien sortant) il a fallu recourir à la force, les Ivoiriens ont donc pris leur destin en main pour éviter le massacre des populations civiles", a-t-il justifié.

Au lendemain du lancement de la vaste offensive des Forces républicaines de M. Ouattara, plusieurs grandes villes sont tombées: Bondoukou (est), près de la frontière ghanéenne, Abengourou (sud-est), Daloa (centre-ouest) et Duékoué (ouest), important carrefour stratégique menant à San Pedro, le plus important port d'exportation du cacao au monde, situé 300 km plus au sud.

C'est à Duékoué que les Forces républicaines, qui regroupent essentiellement l'ex-rébellion pro-Ouattara tenant le Nord depuis son putsch raté de 2002, ont rencontré la plus vive résistance. Les combats - à l'arme lourde notamment - ont duré toute la journée de lundi et plusieurs heures mardi.

•Interrogations sur l'état du clan Gbagbo


Face à l'offensive des forces pro-Ouattara, le clan Gbagbo a demandé mardi soir "un cessez-le-feu immédiat et à l'ouverture du dialogue sous la médiation du haut représentant de l'Union africaine (UA)". "Nous avons reçu un courrier de l'UA nous invitant à une négociation dans le cadre de l'UA, du 4 au 6 avril à Addis Abeba. On n'a pas encore répondu mais il n'y a pas de raison de refuser une occasion de dialoguer", a expliqué le porte-parole du gouvernement Gbagbo, Ahoua Don Mello. L'affaiblissement du camp Gbagbo a été évoqué par le clan d'en face. Selon l'ambassadeur en France d'Allassane Ouattara, Laurent Gbagbo n'a "plus d'argent". "Il fait du saupoudrage, il continue d'acheter quelques personnes mais réellement il n'a aucun moyen pour payer les fonctionnaires."

Isolé diplomatiquement, de plus en plus asphyxié économiquement et sur la défensive militairement, Laurent Gbagbo n'a pas lâché les armes. Hier, son chef d'état-major des forces armées et de défense (FDS) a annoncé que "le moment d'enrôlement effectif" pour les milliers de jeunes qui s'étaient enregistrés la semaine dernière, "était arrivé" et aura lieu à partir de mercredi.



•L'ONUCI accuse le clan Gbagbo d'atrocités

La Mission de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci) a accusé "des forces loyales" au président sortant d'avoir "tiré sur des civils innocents" lundi dans le quartier de Williamsville, "faisant une dizaine de morts". En outre, "un groupe de jeunes pro-Gbagbo ont imposé le supplice du pneu à un jeune homme brûlé vif dans le quartier de la Riviera. Un autre groupe a sauvagement agressé deux fonctionnaires de l'Onuci qui vaquaient à leurs occupations", a affirmé la force onusienne. Le porte-parole du gouvernement Gbagbo a démenti ces informations, estimant qu'il s'agissait d'une "diversion" de l'Onuci (lire notre article: 410 morts, dans 12 aujourd'hui)

•Amnesty international somme l'ONUCI d'intervenir en faveur des réfugiés
Selon Amnesty International, au moins 10.000 civils se sont réfugiés dans la mission catholique de Duékoué, dans l'ouest du pays, après avoir fui les récents combats dans ce carrefour stratégique désormais contrôlé par les forces d'Alassane Ouattara. La mission catholique accueillait déjà 5.000 déplacés. "Le mandat de l'Onuci (mission de l'Onu) requiert des forces de maintien de la paix qu'elles protègent les civils en cas de menace imminente de violence physique. Ils doivent agir immédiatement afin d'éviter de nouvelles effusions de sang", a déclaré Véronique Aubert, directrice adjointe du programme Afrique d'Amnesty.

L'immense majorité des habitants de Duékoué - en particulier les autochtones de l'ethnie guéré, souvent considérés comme partisans du président sortant - avaient fui en brousse ou rejoint des localités plus à l'est pour échapper aux combats. Alors que près d'un million de personnes ont déjà été déplacées et que quelque 112.000 Ivoiriens se sont réfugiés au Liberia, les Nations unies se préparaient à un fort afflux de réfugiés au Ghana.


Source: L'Humanité, du 30/03/2011

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