L’intervention armée de l’Onuci et de la France en Côte d’Ivoire sous prétexte de faire respecter la démocratie et surtout l’arrestation de L. Gbagbo par les forces spéciales françaises (même si la France nie - le contraire aurait été étonnant - ) laisse une très mauvaise image de l’Occident aux yeux de plusieurs africains où un Etat occidental vient imposer par la force armée un nouveau chef d’Etat en Afrique. Que Alassane Outtara ait gagné les élections ou pas, lui que Nicolas Sarkozy avait célébré le mariage quand il était encore maire de Neuilly, le voir être installé au pouvoir de la sorte passera, aux yeux d’une bonne partie de l’opinion publique, comme un pion de la France et des Etats Unis où il a étudié. Ces images des chars français «sous mandat des Nations Unies» arpentant fièrement les artères des rues d’Abidjan, drapeau …français au vent comme en territoire conquis restera longtemps dans certains mémoires. Comme qui dirait l’autre,« les nègres de service sont de retour en Afrique pour répondre aux ordres des esclavagistes des temps modernes». L’avenir nous dira ce qu’il en sera de la réconciliation entre les Ivoiriens, entre les partisans des deux camps. Si une partie de la presse française se félicite de cette intervention et crie «cocorico» en disant «grand merci» à la France, l’opinion suivra attentivement ce qu’il en sera du sort de L. Gbagbo.
Quel sort pour Gbagbo ?
A suivre l’ambassadeur de la Côte d’Ivoire en France, Ali Coulibaly, L. Gbagbo devrait répondre «des crimes contre l’humanité qu’il a commis» et, comme il fallait s’y attendre, pour lui «les forces spéciales françaises n’ont joué aucun rôle» dans l’arrestation, c’est uniquement «la victoire des Forces républicaines de Côte d’Ivoire» (FRCI) pro-Ouattara.
De la même manière, les pro-Ouattara avaient aussi nié avoir commis des massacres à Douékoué. Or, si la presse française avait annoncé l’avancée
«foudroyante» des pro-Ouattara à l’ouest, lesquels ont, en deux jours atteint Abidjan, ce sont surtout les organisations internationales des droits de l’homme qui, depuis lors, affirment que les deux camps ont commis des crimes de guerre. On a vu les images des armes neuves que portaient les forces de pro Ouattara qui ont ainsi été accusées de massacres massifs par des organisations internationales impartiales que sont le CICR, Amnesty International et HRW. Quel que soit le nombre de morts, 100, 200, 300, 800.000, il y a eu des massacres et cela, avec l’appui de la France. Comme l’écrivait le Canard Enchainé le 6 avril 2011, les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), constituées majoritairement par les rebelles qui occupent la moitié nord du pays depuis plus de huit ans, ont été armées par l’Etat français. La France a appuyé la conquête du sud du pays par les forces de Ouattara et a donc fourni non seulement des conseils tactiques aux FRCI, mais aussi des munitions et des Famas (fusils d’assaut). Certes, la justice doit être impartiale et concerner tout le monde, mais force est de constater qu’ici, on a trop tendance à blanchir Ouattara et la France. Comme au Rwanda en 1994, la France officielle a entraîné et équipé des tueurs. Comme au Rwanda avec l’opération turquoise où il y avait déjà l’ONU, elle a récidivé (une expression que N. Sarkozy aime bien) avec l’opération Licorne et est dès lors coresponsable des massacres de Douékoué. Luis Moreno-Ocampo, le procureur de la CPI qui est généralement très bavard lorsqu’il s’agit des Africains, va-t-il … enfin ouvrir une enquête contre un ou des responsables politiques d’un Etat occidental ?
En attendant, l’image de Ouattara, présenté comme un vrai démocrate pour la Côte d’Ivoire et quel que soit le sort de L. Gbagbo, risque d’être entachée par ces massacres commis à Douékoué où, comme au Rwanda, certains parlent de 800.000 morts. Un génocide ? Dans ce premier pays, il y a eu un Tribunal pénal international qui a été institué. Pas sûr que la France vote une résolution instituant un tel Tribunal où elle pourrait être mouillée. Elle y opposerait son véto. Le véto des puissants au détriment des plus faibles où la vie de leur population ne compte pas.
Que fera L. Moreno-Ocampo ?
Author:Fidèle Zegbe Zegs
Source: Congoindépendant 2003-2011, du 15 Avril 2011
Source: Congoindépendant 2003-2011, du 15 Avril 2011
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