C’est la déclaration faite par le président congolais Denis Sassou-Nguesso (DSN)dans une interview accordée à l’hebdomadaire parisien «Jeune Afrique» n°2616 daté du 27 février au 5 mars.
Répondant à la question de savoir si le Congo-Brazzaville va extrader le général Faustin Munene vers Kinshasa, le chef de l’Etat du Congo-Brazzaville a réagit sans équivoque : «(…). Ce n’est pas la première fois que telle ou telle personnalité de la RD Congo traverse le fleuve pour se réfugier chez nous. (…). A chaque fois, nous les interceptons et nous en informons les autorités de Kinshasa. Reste le problème de l’extradition sur lequel nous observons depuis plus de quarante ans une position négative de principe.» Il a justifié cette attitude par le "précédent" Pierre Mulele. Un cas qui est resté au travers de la gorge des autorités brazzavilloises. Exilé au Congo-Brazzaville en 1968, l’ancien chef de la rébellion lancée au Kwilu a été exécuté dès son rapatriement négocié par Justin-Marie Bomboko, alors ministre des Affaires étrangères. «Nous nous sommes promis de ne plus jamais nous tromper de la sorte» a-t-il Sassou-Nguesso avant d’aborder le cas du fameux Ondjani présenté comme le «gourou» des insurgés Enyele. L’homme a été appréhendé à Impfondo, préfecture de la Likouala. La mesure dont bénéfice Munene «vaut d’ailleurs aussi pour le chef tribal Ondjani», a dit Sassou. On ne pourrait cependant s’empêcher de s’interroger sur le fondement juridique de la détention de Munene. A-t-il violé les lois du Congo-Brazzaville? Ou est-il détenu uniquement pour des raisons d’opportunités politico-diplomatiques ?
«La traversée de la savane»
Faustin Munene n’est pas n’importe qui. Le président Sassou-Nguesso est conscient que son extradition équivaudrait à l’envoyer vers une mort certaine. Neveu de Pierre Mulele, «Faustin Benoît» est natif de la province de Bandundu (Kwilu). Il a vécu plusieurs années en exil en Angola où il a mené une carrière militaire ainsi que celle d’infirmier. Il a épousé en seconde une citoyenne angolaise. Lors de la «libération» du 17 mai 1997, le "commandant Faustin" est promu vice-ministre de l’Intérieur dans la première gouvernementale formée par le président Laurent-Désiré Kabila. Il a par la suite assumé les fonctions successives de chef d’état-major général de l’armée congolaise et de chef d’état-major de la Force aérienne. Le 16 janvier 2001, LD Kabila meurt. C’est ici que Munene commence sa «traversée de la savane» en devenant le chancelier des ordres nationaux. «Du vivant de Mzee, Joseph Kabila et Faustin Munene se vouaient une méfiance cordiale, racontent des témoins. Tout séparait les deux hommes : Munene est un homme instruit, franc et direct. Alors que Joseph Kabila est plutôt rustre et sournois. Munene passait pour l’homme de l’Angola alors que Joseph n’a jamais coupé le cordon ombilical avec l’AFDL qui a été une trouvaille du régime rwandais de Paul Kagame». Conscient de cette animosité autant que du rapport de forces en sa défaveur, le «général Faustin» a adopté le profil bas tout en consacrait l’essentiel de son temps aux activités de la «Fondation Pierre Mulele».
Au mois d’octobre 2009, sa résidence dans la commune kinoise de Bandalungwa est attaquée une nuit par des «hommes en uniforme». Les agresseurs semblaient bien informés. Le général se trouvait sur le lieu. L’agression aurait duré trois heures. Les agresseurs ont fini par battre en retraite. Aucune enquête n’a été ouverte à ce jour. Le 27 septembre 2010, nouvelle attaque. au domicile situé dans la commune de la Gombe. Absent du lieu, Munene a eu la vie sauve grâce à un coup de fil : «Ne rentrez pas à la maison de la Gombe, des éléments de la garde présidentielle sont occupés à la perquisitionner.» Un des fils Munene, Fabrice, soutient que Zoé et Jaynet Kabila étaient descendus sur le lieu. «Ils avaient emmené un de nos gardiens de nuit afin qu’il leur montre les adresses des autres propriétés de notre famille», confiait-il. Pou lui, leur père était victime d’une «cabale». Une cabale montée par qui ? Pourquoi ? On apprendra que Munene est suspecté de préparer un coup d’Etat pour renverser «Joseph Kabila».
Général en cavale
Le 4 octobre 2010, la «Famille Mulele» publie à Kinshasa un communiqué informant l’opinion de la «disparition» du général Faustin-Benoît Munene qui est le propre neveu de Pierre Mulele. Le communiqué signale que les résidences de l’intéressé ont été «pillées et assiégées par les militaires en armes appartenant au bataillon PM». «Toutes les personnes trouvées dans ses résidences (membres de la famille, personnel domestique, maçons, visiteurs, et autres) ont été arrêtées et amenées vers une destination inconnue», peut-on lire. Le mardi 12 octobre, le ministre de la Communication et des médias, Lambert Mende Omalanga, tient un point de presse dans la capitale. Il annonce que le général Munene «était entre les mains de la Haute cour militaire et qu’une enquête pré-juridictionnelle était en cours» au sujet des faits mis à sa charge. Quels sont ces faits? Le lendemain mercredi 13, Mende se rétracte : «Le général Faustin Munene qui fait l’objet d’un mandat de comparution devant la Justice militaire, n’a pas déféré à ce mandat et s’est volontairement soustrait des enquêtes y relatives. Il n’est donc pas encore aux arrêts, comme précédemment annoncé». L’inquiétude monte d’un cran dans la famille Munene. «Rien ne nous prouve à ce jour que notre père est toujours en vie malgré les messages d’apaisement des autorités congolaises. Si le général Munene était quelque part nous l’aurions déjà su», se lamente Fabrice Munene.
Début novembre, le général Munene réapparaît sur les ondes du Web radio «Bendele». L’homme ne dit pas un mot sur son lieu de «planque». Pour les uns, il est en Angola le pays d’origine de son épouse. Pour d’autres, il serait «juste en face» au Congo-Brazzaville. Sur un ton digne d’un réquisitoire, le Général de marteler : «Le Congo va mal. La situation du pays est pire qu’à l’époque du maréchal Mobutu.» Et d’ajouter : «Le pays est occupé. Les dirigeants ne travaillent pas pour l’intérêt national.» Après cette entrée en matière, il relate comment il a été traqué telle une bête sauvage par les nervis lancés à ses trousses par «Joseph». Pour lui, il a été victime d’un «règlement de comptes». Il tonne aussitôt : «Il n’y a pas de règlement de comptes dans un Etat de droit. Dans un Etat de droit, la responsabilité est individuelle et les différends sont réglés par voie judiciaire.» Munene de conclure : «Faut-il aller aux élections pour voter les mêmes individus qui violent les droits de la personne humaine?» Le 11 novembre un communiqué attribué à «Faustin» annonce la naissance d’une organisation politico-militaire dénommée «Armée de Résistance Populaire» (ARP). Un opposant politico-militaire est né.
Arrestation
Dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 novembre dernier, le camp militaire colonel Ebeya à Kikwit est attaqué par des individus non identifiés. Bilan : une quantité indéterminée d’armes et de munitions emportée ; trois éléments des FARDC (Forces armées de la RD Congo) tués; quelques «assaillants» capturés. Qui sont les assaillants? D’où viennent-ils? Les réponses à ces questions sont connues des seules plus hautes autorités du pays. Sur ces entrefaites, un bataillon des FARDC (Forces armées de la RD Congo) est déployé dans la ville de Kikwit et le long de la rivière Kwilu. La même démonstration de force a été remarquée lors des événements de Dongo dans la province de l’Equateur. Les observateurs n’ont pas manqué de noter une mobilisation de moyens qui tranche avec la frilosité qu’affiche le pouvoir kabiliste depuis dix ans à l’égard des groupes armés nationaux et étrangers qui sèment l’insécurité tant dans les provinces du Kivu que dans la Province Orientale.
Mi-janvier dernier, la nouvelle de l’arrestation du général Munene a été accueillie comme une mauvaise blague d’étudiants. Le 18 janvier 2011, la presse kinoise confirmait que Faustin Munene a bel et bien été arrêté au Congo-Brazzaville. Le doute n’est plus permis. Que lui reproche-t-on? «Son activisme politique commençait à embarrasser Sassou-Nguesso vis-à-vis de Joseph Kabila», commente un diplomate. Il semble que certains membres de l’entourage de "Joseph Kabila" ont réussi à tisser des liens personnels avec des collaborateurs et autres membres de la famille Sassou. "Il n’est pas rare de voir le journaliste Jean-Marie Kasamba traverser à Brazza juste pour tailler bavette avec Claudia Sassou, conseillère en communication de son père", dit une source locale au "Congo d’en face". Signalons qu’après l’interpellation de Munene, la directrice adjointe du cabinet présidentiel Mayuma Kasende s’est rendu à Oyo, le fief de "DNS". Un seul sujet à l’ordre du jour : l’extradition du général Faustin Munene. La démarche n’a pas abouti. Reste que le «général Faustin» est toujours privé de liberté. En attendant, "DSN" se dit "attentif" sur les prochaines consultations politiques en RD Congo...
«La traversée de la savane»
Faustin Munene n’est pas n’importe qui. Le président Sassou-Nguesso est conscient que son extradition équivaudrait à l’envoyer vers une mort certaine. Neveu de Pierre Mulele, «Faustin Benoît» est natif de la province de Bandundu (Kwilu). Il a vécu plusieurs années en exil en Angola où il a mené une carrière militaire ainsi que celle d’infirmier. Il a épousé en seconde une citoyenne angolaise. Lors de la «libération» du 17 mai 1997, le "commandant Faustin" est promu vice-ministre de l’Intérieur dans la première gouvernementale formée par le président Laurent-Désiré Kabila. Il a par la suite assumé les fonctions successives de chef d’état-major général de l’armée congolaise et de chef d’état-major de la Force aérienne. Le 16 janvier 2001, LD Kabila meurt. C’est ici que Munene commence sa «traversée de la savane» en devenant le chancelier des ordres nationaux. «Du vivant de Mzee, Joseph Kabila et Faustin Munene se vouaient une méfiance cordiale, racontent des témoins. Tout séparait les deux hommes : Munene est un homme instruit, franc et direct. Alors que Joseph Kabila est plutôt rustre et sournois. Munene passait pour l’homme de l’Angola alors que Joseph n’a jamais coupé le cordon ombilical avec l’AFDL qui a été une trouvaille du régime rwandais de Paul Kagame». Conscient de cette animosité autant que du rapport de forces en sa défaveur, le «général Faustin» a adopté le profil bas tout en consacrait l’essentiel de son temps aux activités de la «Fondation Pierre Mulele».
Au mois d’octobre 2009, sa résidence dans la commune kinoise de Bandalungwa est attaquée une nuit par des «hommes en uniforme». Les agresseurs semblaient bien informés. Le général se trouvait sur le lieu. L’agression aurait duré trois heures. Les agresseurs ont fini par battre en retraite. Aucune enquête n’a été ouverte à ce jour. Le 27 septembre 2010, nouvelle attaque. au domicile situé dans la commune de la Gombe. Absent du lieu, Munene a eu la vie sauve grâce à un coup de fil : «Ne rentrez pas à la maison de la Gombe, des éléments de la garde présidentielle sont occupés à la perquisitionner.» Un des fils Munene, Fabrice, soutient que Zoé et Jaynet Kabila étaient descendus sur le lieu. «Ils avaient emmené un de nos gardiens de nuit afin qu’il leur montre les adresses des autres propriétés de notre famille», confiait-il. Pou lui, leur père était victime d’une «cabale». Une cabale montée par qui ? Pourquoi ? On apprendra que Munene est suspecté de préparer un coup d’Etat pour renverser «Joseph Kabila».
Général en cavale
Le 4 octobre 2010, la «Famille Mulele» publie à Kinshasa un communiqué informant l’opinion de la «disparition» du général Faustin-Benoît Munene qui est le propre neveu de Pierre Mulele. Le communiqué signale que les résidences de l’intéressé ont été «pillées et assiégées par les militaires en armes appartenant au bataillon PM». «Toutes les personnes trouvées dans ses résidences (membres de la famille, personnel domestique, maçons, visiteurs, et autres) ont été arrêtées et amenées vers une destination inconnue», peut-on lire. Le mardi 12 octobre, le ministre de la Communication et des médias, Lambert Mende Omalanga, tient un point de presse dans la capitale. Il annonce que le général Munene «était entre les mains de la Haute cour militaire et qu’une enquête pré-juridictionnelle était en cours» au sujet des faits mis à sa charge. Quels sont ces faits? Le lendemain mercredi 13, Mende se rétracte : «Le général Faustin Munene qui fait l’objet d’un mandat de comparution devant la Justice militaire, n’a pas déféré à ce mandat et s’est volontairement soustrait des enquêtes y relatives. Il n’est donc pas encore aux arrêts, comme précédemment annoncé». L’inquiétude monte d’un cran dans la famille Munene. «Rien ne nous prouve à ce jour que notre père est toujours en vie malgré les messages d’apaisement des autorités congolaises. Si le général Munene était quelque part nous l’aurions déjà su», se lamente Fabrice Munene.
Début novembre, le général Munene réapparaît sur les ondes du Web radio «Bendele». L’homme ne dit pas un mot sur son lieu de «planque». Pour les uns, il est en Angola le pays d’origine de son épouse. Pour d’autres, il serait «juste en face» au Congo-Brazzaville. Sur un ton digne d’un réquisitoire, le Général de marteler : «Le Congo va mal. La situation du pays est pire qu’à l’époque du maréchal Mobutu.» Et d’ajouter : «Le pays est occupé. Les dirigeants ne travaillent pas pour l’intérêt national.» Après cette entrée en matière, il relate comment il a été traqué telle une bête sauvage par les nervis lancés à ses trousses par «Joseph». Pour lui, il a été victime d’un «règlement de comptes». Il tonne aussitôt : «Il n’y a pas de règlement de comptes dans un Etat de droit. Dans un Etat de droit, la responsabilité est individuelle et les différends sont réglés par voie judiciaire.» Munene de conclure : «Faut-il aller aux élections pour voter les mêmes individus qui violent les droits de la personne humaine?» Le 11 novembre un communiqué attribué à «Faustin» annonce la naissance d’une organisation politico-militaire dénommée «Armée de Résistance Populaire» (ARP). Un opposant politico-militaire est né.
Arrestation
Dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 novembre dernier, le camp militaire colonel Ebeya à Kikwit est attaqué par des individus non identifiés. Bilan : une quantité indéterminée d’armes et de munitions emportée ; trois éléments des FARDC (Forces armées de la RD Congo) tués; quelques «assaillants» capturés. Qui sont les assaillants? D’où viennent-ils? Les réponses à ces questions sont connues des seules plus hautes autorités du pays. Sur ces entrefaites, un bataillon des FARDC (Forces armées de la RD Congo) est déployé dans la ville de Kikwit et le long de la rivière Kwilu. La même démonstration de force a été remarquée lors des événements de Dongo dans la province de l’Equateur. Les observateurs n’ont pas manqué de noter une mobilisation de moyens qui tranche avec la frilosité qu’affiche le pouvoir kabiliste depuis dix ans à l’égard des groupes armés nationaux et étrangers qui sèment l’insécurité tant dans les provinces du Kivu que dans la Province Orientale.
Mi-janvier dernier, la nouvelle de l’arrestation du général Munene a été accueillie comme une mauvaise blague d’étudiants. Le 18 janvier 2011, la presse kinoise confirmait que Faustin Munene a bel et bien été arrêté au Congo-Brazzaville. Le doute n’est plus permis. Que lui reproche-t-on? «Son activisme politique commençait à embarrasser Sassou-Nguesso vis-à-vis de Joseph Kabila», commente un diplomate. Il semble que certains membres de l’entourage de "Joseph Kabila" ont réussi à tisser des liens personnels avec des collaborateurs et autres membres de la famille Sassou. "Il n’est pas rare de voir le journaliste Jean-Marie Kasamba traverser à Brazza juste pour tailler bavette avec Claudia Sassou, conseillère en communication de son père", dit une source locale au "Congo d’en face". Signalons qu’après l’interpellation de Munene, la directrice adjointe du cabinet présidentiel Mayuma Kasende s’est rendu à Oyo, le fief de "DNS". Un seul sujet à l’ordre du jour : l’extradition du général Faustin Munene. La démarche n’a pas abouti. Reste que le «général Faustin» est toujours privé de liberté. En attendant, "DSN" se dit "attentif" sur les prochaines consultations politiques en RD Congo...
Author: Madeleine Wassembinya/B.A.W
Source: Congoindépendant 2003-2011, du02 Mars 2011
Source: Congoindépendant 2003-2011, du02 Mars 2011
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