Plus de quinze ans, l’instabilité s’est installée à l’Est de la RDC. Partie des conflits interethniques, elle s’est poursuivie avant de se muer en une entreprise de prédation entamée et entretenue par certaines puissances politiques et financières. Sur fond de la lutte légitime du peuple congolais contre la dictature de Mobutu. Chemin faisant, la stratégie change de forme et de tactique : l’usure. C’est la nouvelle arme fatale pour la désagrégation de la RDC comme Etat, dans sa forme actuelle.
Il ne se passe pas un jour, sans qu’il ne soit fait état d’actes d’insécurité posés par des éléments incontrôlés, des miliciens ou encore des forces négatives opérant dans l’Est de la RDC.
Après les armées régulières des Etats voisins de la RDC, le relais des actes de prédation est passé entre les mains des groupuscules difficilement identifiables. Des nébuleuses qui permettent aux tireurs de ficelles de tirer, non seulement des dividendes financiers à travers l’exploitation illicite des matières précieuses, mais aussi de s’assurer le contrôle effectif de cette partie du territoire national.
Depuis 1996, et même quelques années auparavant, l’Est de la RDC était transformé en un Far West. La loi du détenteur de la kalachnikov passait pour un mode de vie. Les Etats voisins qui en sont les plus grands bénéficiaires sont passés maîtres dans l’entretien de ces groupes armés actifs autour des points d’exploitation des matières précieuses.
Connaissant les faiblesses de la RDC, notamment la désarticulation du système de sécurité, ces Etats qui ont contribué activement à cet état des choses, ne sont pas toujours disposés à se départir de ces vielles habitudes. Ce n’est pas de gaité de cœur que ces Etats accepteront de se sevrer de ces ressources issues du chaos qui a élu domicile en RDC.
Des statistiques indiquent que des pays comme le Rwanda, l’Ouganda, le Burundi se sont vu attribuer des chiffres d’exportation des produits non extraits de leurs sous-sols respectifs. A travers la contrebande, des quantités importantes de minerais congolais traversent les frontières pour être écoulées par des circuits officiels de ces pays.
Quant aux multinationales occidentales, elles financent les réseaux maffieux qui ont déployé leur toile dans la sous région. Principales bénéficiaires de ce commerce illicite, ces dernières sous-traitent le volet de l’entretien de l’insécurité par des valets autochtones recrutés parmi des officiels à tous les niveaux. Cela va des militaires aux civils en passant par de simples miliciens, pourvu qu’ils ramènent des quantités nécessaires de minerais contre des millions de dollars américains. L’affaire de l’avion immobilisé à l’aéroport de Goma, édifie quant à ce.
La politique de l’usure
Il appartient aux Congolais de saisir la quintessence de l’orientation qui s’opère actuellement en rapport avec la gestion de la situation qui prévaut à l’Est de la RDC. En lieu et place d’une guerre ouverte et classique entre armées, les acteurs ont changé de stratégies. Nonobstant cela, le résultat escompté reste le même, à savoir la partition de fait du pays. L’attache économique des provinces de l’ex-Kivu avec les pays voisins de l’Est présage de ce que sera la configuration du pays. Les puissants de la planète, adeptes de la dislocation de la RDC dans ses dimensions actuelles, voudraient pousser les populations de ces provinces à se sentir éloignées du reste du pays voire abandonnées de la capitale.
C’est ce que d’aucuns appellent la politique de l’usure. Celle-ci a été adoptée comme stratégie depuis 1996 et elle s’est déclinée en plusieurs étapes. La guerre classique, la lutte autour du contrôle des gisements miniers, la chasse aux forces négatives sans les neutraliser. La psychose de l’insécurité fait que des populations congolaises errent, exposées aux intempéries, à défaut de mourir de faim et de maladies.
Le clou de cette orchestration, assortie d’un décor macabre, consistera à amener les Congolais de l’Est à se lasser d’appartenir à un Etat incapable de leur assurer la sécurité, de vivre dans la quiétude. In fine, une proposition du type appliquée au Sud-Soudan passerait pour une panacée face à ce climat d’insécurité grandissante et permanente.
La communauté internationale, qui n’a pas su répondre jusque là de manière appropriée, se verra placée devant un fait accompli. Aussi n’hésitera-t-elle pas d’apporter sa caution à une solution en apparence humainement et politiquement acceptable. Ce sera l’aboutissement d’un plan mijoté depuis Sun city et dans lequel la plupart d’acteurs politiques et sociaux congolais ne voient que du feu. En lieu et place des FARDC dissuasives, ce sont des plâtrages que les différents partenaires proposent comme solutions.
D’où, la formation d’une Armée nationale républicaine et professionnelle demeure une gageure sinon une vision neuf ans après le Dialogue intercongolais.
Source: Le Potentiel, du 07/03/2011
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