Le chef de l'opposition zambienne Michael Sata a été déclaré tôt vendredi vainqueur de l'élection présidentielle de mardi en Zambie devant le président sortant Rupiah Banda, au terme d'un scrutin tendu et émaillé de violences qui ont fait au moins deux morts.
"Je déclare Michael Chilufya Sata élu président de la République de Zambie", a annoncé à Lusaka le président de la Cour suprême, Ernest Sakala.
Selon la commission électorale nationale, M. Sata, 74 ans, a recueilli 43% des voix, et M. Banda --également âgé de 74 ans-- 36%, après dépouillement des bulletins de vote dans 143 des 150 circonscriptions du pays.
Le nombre des électeurs inscrits dans les sept circonscriptions restantes est inférieur au nombre de voix séparant les deux rivaux, a expliqué la commission pour justifier la proclamation de la victoire de M. Sata, vieux routier de la politique zambienne, surnommé le "roi Cobra" pour son parler mordant qui séduit les laissés-pour-compte du boom minier et qui se présentait pour la quatrième fois à la présidentielle.
Dès l'annonce des résultats, des partisans de l'opposant sont descendus dans les rues de la capitale pour célébrer sa victoire, alors qu'ils craignaient depuis le scrutin que le président sortant ne tente de passer en force.
"On y va Sata, on y va", scandaient les manifestants en liesse face à la police anti-émeutes. "On a finalement eu le président que nous voulions et qui nous écoutera", estimait dans la foule Shadrack Mwewa, chauffeur âgé de 20 ans, avant d'entamer l'hymme national zambien.
La lenteur de la publication des résultats avait exacerbé jeudi la colère des partisans de l'opposant, se soldant par des émeutes ayant fait deux morts, selon la police, dans deux villes minières du centre-nord du pays, Kitwe et Ndola. Ces deux localités se trouvent dans le "Copperbelt" --la "ceinture du cuivre" -- minerai qui constitue la principale source de devise du pays, dont 64% de la population vit dans la pauvreté.
A Lusaka, patrouillé par la police anti-émeutes, la plupart des commerces avaient fermé par crainte de violences.
Le président Banda, proche des milieux d'affaires, avait appelé au calme mais été critiqué pour la première fois par la mission d'observation européenne pour avoir largement financé sa campagne sur des fonds publics.
Les partisans de l'opposition ont caillassé des bus, des commerces, des voitures et des édifices de l'administration et incendié le marché de Chimwenwe, faubourg de Kitwe. La police était intervenue jeudi avec des gaz lacrymogènes.
Le camp présidentiel avait réagi en appelant les Zambiens à "rester calmes et pacifique" et en reprochant à "certaines personnes de profiter des retards dans l'annonce des résultats pour créer l'anarchie".
"Nous voudrions vraiment faire vite mais nous ne pouvons sacrifier l'exactitude des résultats", avait expliqué jeudi la présidente de la Commission électorale, Irene Mambilima.
Auparavant, la Haute cour de Zambie avait interdit aux médias de diffuser "tout article contenant des spéculations sur les résultats (...) avant qu'ils ne soient officiellement annoncés".
Le jour du scrutin, des soupçons de fraude et des retards avaient provoqué la colère des sympathisants de l'opposition dans plusieurs bidonvilles de Lusaka et un début d'émeute à Kanyama, l'un des plus peuplés.
Mercredi, d'autres incidents avaient éclaté à Solwezi, localité minière du Nord-Ouest, où les habitants avaient accusé la commission électorale de vouloir transporter des urnes non scellées.
Ni la commission électorale, ni la centaine d'observateurs européens, présents depuis le 12 août, n'ont cependant trouvé de preuves de fraude. En revanche, l'accès aux moyens de campagne a été "inégal" au profit du parti présidentiel, selon la chef de mission européenne Maria Muniz De Urquiza.
Source: Liberation, du 23/09/2011
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