Profitant d’une réunion des institutions diplomatiques et
sécuritaires de deux pays, Louise Mushikiwabu, ministre rwandaise des Affaires
Etrangères et de la Coopération a été reçue hier par Joseph Kabila, le président
de la République, à l’issue d’une réunion bilatérale entre les délégations
respectives *Dans un communiqué rendu public hier, le mystère demeure quant à
l’appui avéré du Rwanda aux mutins du M23, mais les deux pays ont seulement
renouvelé leur détermination à poursuivre les efforts jusqu’à l’éradication
totale des FDLR et de tous les groupes armés *Entre-temps, la Haut-Commissaire
aux Droits de l’Homme a exprimé sa profonde préoccupation par rapport à la
sécurité de la population civile habitant dans l’est de la Rd Congo, surtout que
Les dirigeants du M23 figurent parmi les auteurs des pires violations des droits
de l’homme en Rdc, et même dans le monde.
C’est depuis le lundi dernier
qu’une délégation rwandaise, conduite par Louise Mushikiwabu, ministre des
Affaires Etrangères et de la Coopération de la République du Rwanda est dans nos
murs. Et ce, dans le cadre du dialogue permanent entre les autorités de deux
pays. Selon le communiqué final qui a été rendu public hier dans la soirée,
cette rencontre est la matérialisation de la volonté de deux pays de restaurer
et de maintenir un environnement de paix, de sécurité et d’entente mutuelle
entre la Rd Congo et le Rwanda, deux pays voisins. Reçue hier par le président
de la République Joseph Kabila, Louise Mushikiwabo a indiqué qu’elle est venue
officiellement en Rd Congo pour une réunion des instituions diplomatiques et
sécuritaires du Rwanda et de la Rd Congo.
Une insulte aux
Congolais
Réagissant à une question de la presse sur le soutien avéré de
son pays aux mutins du M23, la ministre rwandaise des Affaires Etrangères répond
: « l’opinion doit être éduquée et comprendre que le Rwanda a longtemps
travaillé pour la pacification de la région des Grands lacs ». Et d’ajouter, les
deux pays ont hérité d’une histoire et il n’y a pas un problème impossible à
régler. Il s’agit d’une prise de position qui a surpris plus d’une personne,
surtout lorsque la ministre déclare pince sans rire que l’opinion doit être
éduquée. Comme si cette opinion était constituée de bourriques qui ne
comprennent rien de la situation sécuritaire à l’Est de la Rd Congo. Qui ne
comprend pas, avec les enquêtes de la MONUSCO, de Human Rights Watch,… que le
Rwanda a effectivement soutenu les mutins de M23 ? En lieu et place d’une
explication, c’est au contraire une injure que les Congolais devront
difficilement digérer. Pendant combien de temps la Rd Congo continuera – t- elle
à recevoir des leçons d’un autre pays, si africain soit-il ? Pendant combien de
temps la Rd Congo sera-t-elle toujours humiliée ?
Toutefois, la patronne
de la diplomatie rwandaise émet un vœu, une fois retournée dans son pays, de
faire plus, surtout dans les domaines où il n’y a pas eu du tout des avancées. «
Je pars avec un engagement pour soutenir les efforts de la Rd Congo dans la
quête de la paix durable dans ce pays qui reste dans le paysage immédiat du
Rwanda et nous nous sommes convenus que les dirigeants de la défense et de la
sécurité de deux pays se réuniront dans quelques jours à Goma ».
On a
trop parlé de la sécurité
C’est l’avis de Raymond Tshibanda, ministre des
Affaires Etrangères de la Rd Congo qui a émis un vœu de voir les deux pays
parler désormais sur la coopération et le développement que sur la sécurité.
Pour lui, cette réunion bilatérale avait une signification particulière dans la
mesure où elle se tient au lendemain de la mutinerie qui était de nature à jeter
les troubles entre les deux pays. Il affirme que la réunion aura été fructueuse,
non seulement parce que les différentes parties ont été bien informées et plus
déterminer à coopérer, mais surtout parce qu’elle a abouti à des décisions
pratiques dont la mise en œuvre devra améliorer la situation sur terrain. Mais
comme nous l’avons eu à le souligner, c’est sur un goût amer que la réunion
s’est terminée. En effet, aucun mot n’a été dit sur l’appui que le Rwanda donne
aux mutins de M23 et les congolais sont restés sur leur soif. Peut-être que le
rapprochement entre les deux pays qui ne sont pas à leur première réunion pourra
influer sur le comportement non seulement des mutins, que de leur
parrain.
L’ONU craint de nouveaux abus des droits de l’homme
Dans
une dépêche parvenue à notre rédaction, la Haut-Commissaire aux Droits de
l’Homme, Navi Pillay, a exprimé sa profonde préoccupation par rapport à la
sécurité de la population civile habitant dans l’est de la Rd Congo (RDC), alors
que les combats entre l’armée congolaise et le mouvement M23, qui est à
l’origine d’une mutinerie dans la province du Nord-Kivu, sous la direction d’un
groupe tristement célèbre d’auteurs de violations des droits de
l’homme.
« Les dirigeants du M23 figurent parmi les auteurs des pires
violations des droits de l’homme en RDC, et même dans le monde, » a souligné Mme
Pillay. « Beaucoup d’entre eux ont un passé consternant, comprenant des
allégations de participation à des viols de masse, la responsabilité de
massacres, et le recrutement et l’utilisation d’enfants. » « Beaucoup d’entre
eux pourraient être responsables de crimes de guerre », a-t-elle ajouté. « Je
crains la possibilité qu’ils imposent davantage d’horreurs à la population
civile lors d’attaques de villages à l’est de la RDC. » Le M23 est composé de
déserteurs de l’armée qui appartenaient auparavant aux groupes armés CNDP et
PARECO, qui ont été intégrés dans l’armée nationale suite à un accord de paix
conclu en 2009.
La haute direction du M23 comprend Sultani Makenga, un
colonel et ancien chef rebelle qui aurait été impliqué dans des massacres de
civils et le recrutement d’enfants pour les faire participer activement à des
hostilités, et Bosco Ntaganda, l’adjoint de Laurent Nkundabatware, devenu
général de l’armée et aujourd’hui recherché par la Cour pénale internationale
pour crimes de guerre pour recrutement et utilisation d’enfants dans les combats
dans le district de l’Ituri, au nord-est de la RDC, en 2002-2003. Au Nord-Kivu
uniquement, des affrontements entre le M23 et l’armée congolaise ont déjà
entraîné la fuite de quelque 218 000 personnes depuis avril 2012. « Tous les
efforts doivent être entrepris pour tenir ces hommes, et les soldats sous leur
commandement, responsables des violations des droits de l’homme commises contre
des civils – à la fois pour les crimes commis dans le cadre de la présente
mutinerie, ainsi que pour les infractions commises antérieurement, » a déclaré
Mme Pillay. En particulier, Mme Pillay a exprimé son inquiétude quant au fait
que le pratique du recrutement et de l’utilisation d’enfants a été maintenue
jusqu’à très récemment, comme constaté plus tôt ce mois-ci lorsque la MONUSCO a
réussi à secourir 20 mineurs faisant partie du 811ème Régiment de l’armée
congolaise (FARDC), auparavant sous le commandement du Colonel Innocent
Zimurinda, actuel membre du M23 et ancien commandant du CNDP. Les enfants ont
été recrutés dans la province du Nord-Kivu entre 2008 et janvier
2012.
Toutes les parties doivent respecter les droits de
l’homme
Pillay a appelé toutes les parties, y compris les FARDC, à
respecter le droit international humanitaire et les droits de l’homme et à
prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection de la
population civile. Les principaux dirigeants du M23 comprennent les personnes
suivantes, qui ont toutes été mentionnées dans le Rapport final du Groupe
d’experts sur la RDC (S/2009/603) comme faisant partie du commandement des FARDC
avec un passé établi d’abus des droits de l’homme : le Colonel Sultani Makenga,
le Colonel Baudouin Ngaruye et le Général Bosco
Ntaganda.
Source: L'Avenir
Quotidien, du 20/06/2012
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