France-Turquoise, une association rassemblant des anciens militaires de l’Opération TURQUOISE au Rwanda (1994) a, par un communiqué posté sur son site, protesté contre la visite de Paul Kagame à Paris le 12 septembre prochain et considère qu’ en accueillant Paul Kagame, « la France brade son honneur et couvre un tissu de mensonges ».
France-Turquoise est une association ayant pour objectif de » rassembler les militaires, anciens de l’Opération TURQUOISE au Rwanda, une opération française autorisée par l’ONU au travers de la Résolution 929 de juin 1994 et qui devait viser à « contribuer, de manière impartiale, à la sécurité et à la protection des personnes déplacées, des réfugiés et des civils en danger au Rwanda. ».
L’association a également pour objet de rassembler les militaires des précédentes interventions militaires de la France dans ce pays, ainsi que les anciens coopérants (civils et militaires) et les sympathisants (civils et militaires) qui voudront se joindre à eux, autour des objectifs » , dont le principal est de « Défendre et promouvoir, par tous les moyens appropriés, la mémoire et l’honneur de l’armée française et des militaires français ayant servi au Rwanda et Participer par tous les moyens appropriés, à l’établissement ou au rétablissement de la vérité sur l’action de l’armée française et des militaires français au Rwanda « .
L’annonce de la visite de Paul Kagame le 12 septembre prochain en France, a suscité un remou au sein de cette association pour la simple raison que, cet hôte n’a cessé d’accuser l’armée française d’avoir participé au génocide de 1994 au Rwanda. On comprend donc pourquoi, les militaires français dont en première ligne ceux de l’association France Turquoise soient consternés par cette visite annoncée. Dans un communiqué signé par son président en la personne du Général Jean-Claude Lafourcade, l’association France-Turquoise, affirme qu’elle « ne peut accepter, en l’absence de démenti ou de dénonciation formelle des très graves accusations portées, que l’honneur des soldats ayant servi la France au Rwanda soit bafoué par la visite de M. Kagame ».
En effet, dans un document de plusieurs centaines de pages connu sous le nom de « rapport Mucyo » qui a été rendu public en août 2008, le Rwanda met directement en cause la France, tout en particulier l’armée française d’avoir pris part aux tueries des Tutsi en 1994 au Rwanda et cite nommément le nom de plusieurs personnalités politiques françaises dont François Mitterand, Dominique De Villepin, Edouard Balladur, Hubert Védrine et Alain Juppé. . La commission chargée de rédiger ce dit rapport, affirme qu’il lui a été rapporté « des cas de personnes ayant subi des traitements cruels, inhumains et dégradants de la part de militaires français ». Ainsi nous pouvons lire à la page 251 de ce rapport que, cette violence se caractérise par, « des actes de violence aggravée, telles que les largages dans la forêt ou en rase campagne depuis des hélicoptères, le fait d’attacher les membres des victimes pour ensuite les passer à tabac, les coups, des actes visant à terroriser, etc. ».
Le 7 avril 2007, le Général Kagame lui-même a déclaré publiquement que « les soldats de Turquoise « étaient venus au Rwanda pour tuer les Tutsi ».
En août 2008, après les travaux de cette commission, le gouvernement rwandais, dans un communiqué officiel, accusait la France et l’armée française « d’avoir participé à l’exécution du génocide » en publiant une liste d’officiers mis en cause dont Jean-Claude Lafourcade qui commandait l’opération Turquoise, et cinq colonels.
Après avoir été mis en cause par le dit rapport Mucyo, cinq généraux, dont Jean-Claude Lafourcade ont porté plainte en diffamation. « Ces accusations graves et infondées ne pouvaient rester sans réponse. C’est pourquoi, une dizaine d’officiers mis en cause, atteints dans leur honneur, ont décidé de donner une suite judiciaire aux accusations ainsi portées, devant la justice de notre pays », a expliqué l’officier supérieur dans un communiqué après le dépôt de la plainte. »
Les militaires français de l’association France Turquoise se demandent comment le dictateur rwandais Paul Kagame peut-il se permettre de séjourner en France tout en maintenant ces accusations mensongères de « participation directe au génocide à l’encontre des soldats français qui ont servi au Rwanda, en particulier lors de l’opération Turquoise ».
Ces soldats affirment avoir demandé sans réponse au président de la République (Nicolas Sarkozy), de s’exprimer publiquement sur ce sujet pour éclaircir les choses. Ceux-ci craignent que si rien n’est fait, « une telle visite ne pourra que contribuer à inscrire dans l’Histoire l’affirmation selon laquelle des soldats français ont participé au génocide rwandais en 1994. Cette falsification des faits, déshonorante pour l’armée française, est naturellement inacceptable ».
Ces militaires se demandent comment Kagame peut-il maintenir les accusations selon lesquelles, « les militaires français de l’opération Turquoise ont participé au génocide de 1994″, alors que la Communauté Internationale et les responsables politiques de l’époque ont pourtant affirmé clairement que l’opération Turquoise s’est exactement déroulée, sous les yeux de nombreux observateurs, dans les conditions prévues par la résolution 929 des Nations Unies en respectant strictement les directives du gouvernement français. D’ailleurs la mission d’information parlementaire présidée par Paul Quilès en 1998 a rejeté toute implication de la France et de son armée dans le génocide.
France-Turquoise tient à réaffirmer que contrairement aux accusations mensongères de Paul Kagame, l’opération Turquoise est à l’honneur de la France puisqu’elle a permis de « sauver plusieurs dizaines de milliers de vies ».
Ces militaires ajoutent qu’ils ne sont pas les seuls à rejeter catégoriquement ces accusations, l’actuel ministre des affaires étrangères français Alain Juppé, également mis en cause par le rapport « Mucyo », les a lui même personnellement qualifiées de « tissu de mensonges », précisant que les « témoignages » sur lesquels elles s’appuient sont instrumentalisés. « Elles proviennent d’un régime dont la nature plus qu’autoritaire est de plus en plus soulignée par la Communauté Internationale » ajoute – il. Ce dernier a déclaré également qu’il n’avait pas l’intention de se rendre au Rwanda, où d’ ailleurs il n’est pas le bienvenu (selon les dires de Paul Kagame), « tant que ce rapport accusant la France de complicité dans le génocide de 1994 continuerait à circuler ».
Pour les militaires de la France Turquoise, il est dans l’honneur de la France de prendre leurs distances avec un homme comme Paul Kagame dont les dérives autoritaires ne cessent de proliférer une indignation aux quatre coins de la planète. D’ailleurs ça ne sera pas sans précédant puisqu’au cours de ces derniers mois, les chefs de gouvernements espagnol, belge et britannique ont refusé de recevoir l’homme fort du Rwanda.
Ces militaires tiennent à préciser que la « normalisation des relations avec le Rwanda est peut-être souhaitable, mais pas à n’importe quel prix ». Et ajoutent que cette normalisation ne doit en aucun cas inciter la France à « fermer les yeux sur la réalité du régime rwandais, ni que le président de la République, chef des armées, couvre de par son silence les calomnies proférées contre les soldats de l’opération Turquoise ».
Il y a peu de temps à la veille de la visite officielle de Mouammar Khadafi en France, Rama Yade, alors Secrétaire d’Etat aux Droits de l’Homme, a crevé l’abcès en déclarant que Khadafi, « doit comprendre que notre pays n’est pas un paillasson sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s’essuyer les pieds du sang de ses forfaits. La France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort. » Si à cette période cette déclaration a fait des vagues surtout au sein de son parti (la majorité présidentielle), aujourd’hui personne ne peut dire qu’elle n’avait pas raison et l’actualité nous en dit plus. Les photos mêmes de cette visite où Sarkozy lui serre la main ont miraculeusement disparu sur le site officiel de l’Elysée. Si Sarkozy avait voulu écouter sa secrétaire aux Droits de l’Homme, aujourd’hui ses conseillers n’auraient pas la lourde tâche de devoir remuer ciel et terre pour gommer les traces de la visite Khadafienne en France où le dictateur Libyen a été accueilli en grande pompe.
Il est à espérer que Sarkozy ne regrettera pas dans les prochains mois, d’avoir accueilli en grande pompe un dictateur accusé il y’a à peine un an par les Nations Unies d’être responsable de la commission des crimes les plus graves touchant la communauté internationale à savoir des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, voire même un génocide.
N’y a t- il pas une contradiction dans la politique étrangère de la France qui bombarde Kadhafi tout en déroulant un tapis rouge au plus grand criminel actuellement au pouvoir, pour emprunter l’expression de Filip Reyntjens ? Il sera intéressant de regarder comment Sarkozy accueillera un chef de l’Etat que les voisins de la France ont clairement jugé infréquentable en refusant de l’accueillir.
En tout cas, ça ne sera pas une surprise pour personne de voir Sarkozy se photographiant en serrant les mains de Paul Kagame que beaucoup disent sanglantes car d’ailleurs au cours de sa visite au Rwanda en février 2010, il ne s’était pas gêné d’être photographié en compagnie d’officiers rwandais faisant l’objet de mandats d’arrêt internationaux émis par le magistrat français Bruguière.
Author:Jean Mitari
Source: Jambonews.net, du 22/08/2011
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